Publié le Mercredi 3 février 2021 à 12h32.

48e festival de BD d’Angoulême : les scénaristes et dessinateurs continuent la lutte !

Il se passe toujours quelque chose à Angoulême même quand, en raison de la pandémie, il ne se passe rien.

La mobilisation des auteurs et autrices avait été si forte l’an passé que Macron avait dû, sur la base du rapport établi par Bruno Racine, promettre de prendre des décisions quant au statut des auteurs pour les sortir de la précarité. Douze mois plus tard, rien n’ayant été fait ou presque, les auteurs et autrices ont repris le sentier de la guerre et décidé de se servir de la caisse de résonance de la remise des prix du festival (sans public) pour se faire entendre et menacer de boycotter l’édition publique de fin juin.

La profession toujours plus précaire

Le monde capitaliste de l’édition de la bande dessinée se porte à merveille et la pandémie n’a en rien ralenti la progression des ventes (+ 9 % en 2020). Pourtant les auteurs et autrices (à quelques exceptions près) continuent à être les moins bien payés de la chaîne du livre tant pour le forfait (à valoir) par œuvre proposé par la maison d’édition que pour la commission sur vente. La situation est telle que la moitié de la profession gagne moins que le SMIC et un tiers est en dessous du seuil de pauvreté. De plus, la faiblesse de leur statut d’auteur ne leur permet pas de négocier pour être payé quand, par exemple, leurs œuvres sont reproduites dans les gares comme actuellement car, pour la SNCF, il ne s’agit pas d’exposition mais de promotion (sic). À tous ces problèmes s’ajoute la question de la protection sociale (maladie et retraite) où le passage de l’Agessa à l’Ursaff ne s’est pas fait sans casse et incompréhension. La coupe était déjà pleine l’année dernière mais à présent elle déborde…

Menace de boycott de l’édition publique du festival à la fin juin

Passèrent plusieurs mois et la « nouvelle » ministre de la Culture ne s’engagea pas plus que son prédécesseur pour faire plier les lobbys du Syndicat national de l’édition accrochés à leur marge bénéficiaire. Le 31 octobre 2020, Florence Cestac, Catherine Meurisse, Régis Loisel et Jul qui présidaient « 2020, année de la BD » démissionnèrent collectivement pour dénoncer « l’incohérence et les contradictions des choix politiques [du gouvernement] à l’égard de la culture » et ne pas cautionner une mascarade. Le maintien de la fermeture des librairies pendant le deuxième confinement venant s’ajouter au problème global. Un peu plus tard, ce sont les auteurs Fabien Vehlmann et Gwen de Bonneval, coscénaristes de la série Le dernier Atlas et lauréats du prix Goscinny 2020, qui refusaient de préparer une exposition tant que rien ne bougeait. Enfin, le 21 janvier le collectif Autrices, Auteurs en Action (AAA) créé lors du festival 2020, publiait une tribune appelant à boycotter l’édition publique de 2021 (24-27 juin).

La tribune a reçu le soutien de plus 700 scénaristes et dessinateurEs dont d’anciens Grand Prix d’Angoulême comme André Juliard et Cosey, et plus de la moitié viennent de la jeune génération qui « monte ». La tribune a engendré un vent de panique chez les organisateurs du festival déjà bien secoués par la pandémie. Ces derniers évoquent la « possible fermeture d’un lieu d’expression démocratique » qui n’a jamais lésiné son soutien aux artistes. Il y a les mots et les actes et le festival d’Angoulême devrait soutenir publiquement les artistes et s’engager résolument dans l’action pour faire céder Macron et les patrons de l’édition.