Publié le Samedi 28 octobre 2017 à 12h14.

BD : Calypso

De Cosey. Sur une idée de François Matille, Futuropolis, 102 pages, 20 euros. 

Grand prix du festival d’Angoulême en ce début d’année 2017 pour l’ensemble de son œuvre, Cosey avait annoncé la finalisation d’un roman graphique en noir et blanc.

Un petit coup de tonnerre dans le monde du 9e art, qui n’a cessé depuis 40 ans de vanter la palette de couleurs du dessinateur vaudois, que ce soit pour sa série Jonathan (aux éditions du Lombard) ou ses somptueux récits graphiques (Le Voyage en Italie, Saigon-Hanoï, etc.). Toutes les nuances de bleu, des ocres et des jaunes rehaussées par l’utilisation d’un blanc magique donnent la parole aux dessins au point de minimaliser les bulles. Ainsi Saigon-Hanoï ne compte pratiquement aucun dialogue. Ce passage au noir et blanc était donc attendu avec impatience. Les fans peuvent être rassurés, la lumière de Cosey éclate aussi en noir et blanc !

Un travail sur le noir et le blanc

Le scénario met en scène un monde d’ouvriers de chantier dans les Alpes suisses autant cassés par les revers de la vie que la dureté et la dangerosité des travaux. Gus et son ami Pepe, après leur journée de labeur, se retrouvent à l’auberge du village. À la télé, on rediffuse Calypso, film mythique dans lequel irradie l’actrice Georgia Gould. Quelques réactions machistes des collègues font sortir Gus de ses gonds. Il confesse à Pépé que Georgia Gould n’est autre que sa camarade de collège et son grand amour de jeunesse, il y a plus de 40 ans de cela. 

Georgia est de retour au pays. Elle vient d’être admise dans la luxueuse et discrète clinique Edelweiss, pour y soigner ses addictions. L’actrice renoue avec Gus et lui confie que son docteur et gestionnaire de fortune la manipule et l’escroque. Georgia propose alors à Gus et Pepe d’organiser un faux kidnapping avec demande de rançon à la clé. Bien sûr, Georgia n’a pas tout dit et rien ne se passera comme prévu…

La trame sans prétention, quoiqu’un peu naïve, ainsi que les lieux du récit, permettent à Cosey de travailler le noir et le blanc comme des couleurs à part entière en s’affranchissant de « la grande tradition du clair-obscur qui fait que le noir correspond généralement à l’ombre et le blanc à la lumière » Pour ce faire Cosey ne s’embarrasse pas des contours, il travaille les masses où le blanc peut se dissoudre dans le blanc (l’eau claire d’un lac dans la neige de la montagne) et le noir dans le noir (obscurité de la forêt dans la nuit profonde).

En théorie, il s’agit d’un « one shot ». Dommage !

Sylvain Chardon