De Robert Badinter et Antoine Lyon-Caen. Fayard, 8 euros.
Bien que ses deux auteurs se défendent de toute intention maligne (Badinter, grande conscience de gauche, et Lyon-Caen, professeur émérite en droit du travail issu d’une lignée de juristes proches du mouvement syndical), cet opuscule consacré au code du travail parait curieusement au moment où le gouvernement, à la suite des lois Macron et Rebsamen, a mis en place une commission visant à redéfinir l’articulation entre la loi et la négociation sociale...
Le livre commence d’emblée en établissant un lien entre la montée continuelle du chômage et la complexité grandissante de la législation du travail : outre le caractère discutable de cette thèse, rien n’est dit sur le fait que c’est la multiplication, à la demande du patronat, des dérogations aux règles de droit qui fait prendre à ce bon vieux code autant de pages supplémentaires et en affaiblit d’autant les principes… Ainsi il existe désormais pas moins d’une vingtaine d’objets de recours possible au CDD et de multiples exceptions au repos dominical qui vont encore être accentuées par la loi Macron.
Pour résoudre cette situation, les auteurs préconisent de mettre en évidence cinquante principes en matière de relation individuelle de travail, ce qui aboutirait à la création d’un droit du travail à deux vitesses, dans les PME et dans les grand groupes. Ainsi, il n’est plus fait mention du Smic mais d’un salaire assurant une vie libre et digne... Idem pour la référence à la durée normale de travail renvoyée de manière supplétive à la loi. Situation incongrue pour des partisans de la négociation collective qui n’a de sens que si elle s’exerce par exemple entre un plancher et/ou un plafond ! Tout juste partage-t-on leur proposition de mise en place d’une représentation universelle du personnel visant à assurer l’effectivité de la législation sociale.
Au final, le droit du travail, au prétexte d’une meilleure intelligibilité, est sèchement réduit à une technique de conciliation entre les intérêts de l’employeur et ceux du salarié. Le lien de subordination, notion essentielle, est pieusement estompé, alors qu’il découle du caractère léonin du contrat de travail un antagonisme irrémédiable entre dominant et dominé, et que chaque ligne du code est censé constituer une digue à l’exploitation.
LD