Publié le Dimanche 1 mars 2015 à 21h41.

Essai : Sacrée croissance !

Marie-Monique Robin. Préface de Matthieu Ricard. Éditions La Découverte. 2014, 19,90 euros

Marie-Monique Robin (MMR) a choisi le style de la science-fiction en se plaçant en 2034, 20 ans après le début de la Grande transition. Pour une fois, le rapport du GIEC a été lu et entendu... Dans un grand sursaut mondial, tous les chefs d’État, les médias, les patrons, ont pris conscience de la catastrophe climatique en devenir et ont décidé de changer le cours des choses. Outre le fait que 2014 est passé sans qu’il n’y ait eu le moindre début de prise de conscience collective, croire que François Hollande renoncerait à la croissance ou Xavier Beulin à l’agriculture productiviste rend le livre complètement irréaliste, énervant, voire comique…

D’après MMR, si notre civilisation est arrivée au bord de l’effondrement, si nous avons atteint et dépassé les limites de la planète, c’est à cause de la recherche effrénée de la croissance. MMR nous gratifie d’un cours accéléré en économie dans lequel elle essaie de démontrer que le problème n’est pas le capitalisme, mais les dérives néoclassiques du capitalisme.La description de la situation – addiction au pétrole, extinction des espèces, entrée dans l’anthropocène, bouleversement climatique, etc. – n’est pas sans intérêt mais n’apporte rien de plus que les multiples auteurs cités par MMR.

Dans un souci de positiver, l’auteur liste une série d’expériences qui permettraient de changer le monde, mais les limites en sont pourtant évidentes. Pour rendre les villes résilientes, MMR met en avant l’agriculture urbaine, comme si les mégalopoles du 21e siècle pouvaient être comparées au Paris du 19e. Loin de réduire les inégalités, les expériences pour changer de modèle énergétique ne font que les perpétuer : au Danemark, les méga-éoliennes ou la chaufferie gigantesque ; au Népal, le micro-méthaniseur à manivelle. De plus, les monnaies locales permettraient de se défaire de la mainmise de la finance internationale, de la dette et des taux d’intérêt !

Imaginer que l’on pourrait changer le monde sans changer le rapport de forces et que les capitalistes renonceraient à leurs privilèges de leur bon vouloir, est non seulement naïf, mais dangereux, laissant croire que la lutte est inutile.

François Favre