Aux Archives nationales, Hôtel de Soubise (Paris) et Pierrefitte-sur-Seine.
Pour celles et ceux qui seront à Paris d’ici à la mi-septembre, une exposition à voir sur deux sites des archives, puisque 50 ans après Mai 68, les archives de l’État deviennent -publiques. C’est l’occasion d’entrevoir au plus près le fonctionnement de l’appareil d’État, et en particulier de son appareil policier, en pleine crise sociale et politique.
À l’Hôtel de Soubise, on peut découvrir par quels moyens l’État s’efforce de « continuer à fonctionner » alors que la crise s’approfondit et que la grève se généralise : des notes des recteurs et présidents d’université en passant par l’organisation du rationnement et du ravitaillement en essence ou la mise en place d’un service spécial pour contourner la grève des postes. Mais c’est surtout le fonctionnement de l’information policière, synthétisée dans les multiples « notes blanches » des Renseignements généraux, qui illustre au jour le jour les moyens d’informer le pouvoir. Les notes blanches fournissent à la fois des éléments factuels (chiffres, contenus des tracts, mots d’ordres), mais aussi des « notes d’ambiance » pour apprécier les effets des initiatives politiques sur l’opinion publique. Et enfin des analyses des positionnements des forces politiques. On peut aussi découvrir le compte-rendu de la réunion du Bureau de liaison au ministère de l’Intérieur qui discute le 11 juin de la dissolution des organisations d’extrême gauche, dont le décret a été publié le 12 juin. Ou encore le projet de loi du 6 juin amnistiant les « faits commis pendant les évènements d’Algérie », autrement dit les fachos de l’OAS et leurs comparses…
Aux Archives nationales à Pierrefitte, on retrouve des documents plus connus, un foisonnement de tracts, d’affiches, en fait tout ce qui a été saisi par la police pendant les mois de mai et juin 68. Cela donne une idée de l’omniprésence de la police sur tous les lieux de manifestation mais aussi d’occupation (Beaux-Arts, faculté de médecine, Sorbonne...). Des policiers, en civils ou infiltrés, prenaient ou photographiaient absolument tout ce qui permettait de repérer, d’identifier et, après le 12 juin, d’inculper les militantEs les plus contestataires. Et de ce point de vue, la JCR tenait une place de choix. Avec des affiches manuscrites de la période électorale, constituant des preuves de reconstitution d’une organisation dissoute, mais aussi le procès-verbal de perquisition chez un certain Alain Krivine, le 14 juin 1968…
Un autre regard instructif !
Cathy Billard