Publié le Mercredi 5 juillet 2017 à 11h26.

L’anthropocène contre l’histoire. Le réchauffement climatique à l’ère du capital

De Andréas Malm Édition La Fabrique, 2017, 15 euros. 

Ce livre est un recueil d’articles dans lesquels Andréas Malm, universitaire suédois, écologiste, marxiste, discute du concept à la mode d’« anthropocène » qui définit l’époque où l’impact des activités humaines est devenu si important qu’il entraîne notamment un bouleversement du climat.

Cette notion d’anthropocène introduit une confusion, en faisant de l’humanité un tout homogène, gommant sa particularité essentielle : son histoire sociale. Or si, pour Andreas Malm, l’origine humaine du réchauffement climatique est la découverte scientifique fondamentale de notre époque, elle doit nous faire prendre conscience qu’il trouve son origine dans les rapports sociaux de classes qui structurent la société capitaliste.

Ainsi, il combat l’idée que c’est toute l’humanité qui serait collectivement responsable de l’augmentation des émissions de CO2 (principal responsable du réchauffement actuel), du fait de l’augmentation de la population et de la consommation. Quelques chiffres pour déconstruire ce préjugé : Entre 1820 et 2010, la population humaine a été multipliée par 6,6 alors que les émissions de CO2 l’ont été par plus de 650. D’autre part, entre 1980 et 2005, la population a eu tendance à croître plus vite... là où les émissions augmentaient le plus lentement. Enfin, les 45 % les plus pauvres de la population mondiale sont responsables de 7 % des émissions, quand les 7 % les plus riches sont à l’origine de 50 % des émissions !

Conjurer la catastrophe imminente

Face aux idées fausses introduites par l’anthropocène, « l’alternative évidente est Marx » ! L’histoire du capitalisme s’accompagne de l’explosion de l’utilisation massive des énergies fossiles. C’est pour cela que l’auteur s’attache à décrire les débuts de la révolution industrielle en Angleterre au 19e siècle quand s’est généralisée l’utilisation de la machine à vapeur et donc du charbon. Il montre à quel point cela a correspondu non aux besoins de l’ensemble de la société anglaise, mais aux intérêts de classe de la bourgeoisie qui l’a ensuite imposé au reste du monde. Le charbon, capital fossile, source d’énergie parfaitement adaptée aux besoins du capitalisme, est devenu partie intégrante des cycles d’accumulation du capital. Ce n’est pas l’augmentation de la population et de la consommation qui explique l’essor des énergies fossiles, mais la logique sans fin d’accumulation du capital sous l’aiguillon du profit. 

Un livre utile et important, dans lequel l’auteur a la volonté d’intégrer la question climatique à la critique marxiste du capitalisme et d’élargir ainsi la discussion aux perspectives que cela ouvre pour les révolutionnaires. « Le changement climatique pourrait bien être l’accélérateur du 21e siècle, en précipitant les contradictions du capitalisme tardif (…) et en déclenchant des catastrophes locales à répétition. » C’est à ce niveau de réponse que ce livre militant nous appelle à réfléchir : la transformation révolutionnaire de la société, seul moyen de conjurer la catastrophe imminente !

Bruno Bajou