Silo, Hugh Howey, coll. Exofiction, Actes Sud, 2013, 560 pages, 23 euros.
Dans un monde post-apocalyptique, la poignée d’êtres humains qui a survécu à la catastrophe ayant rendu la surface de la planète inhabitable s’est réfugiée dans un profond silo enterré, au sein duquel elle a organisé toute son existence. Seul contact avec l’extérieur, quelques caméras qui diffusent en continu, sur grand écran, l’image de la surface continuellement balayée par les vents chargés de toxines. La vie est rude au sein du silo, et les règles strictes imposent de ne pas évoquer l’idée-même de sortir à l’extérieur – sous peine d’être condamné au bannissement et au nettoyage des capteurs, ce qui signifie une mort certaine.
Le roman s’ouvre avec la condamnation du shérif du silo au « nettoyage ». Trois ans après sa femme, il se retrouve lui-même à douter du bien-fondé des règles et lois en vigueur : les images transmises par les capteurs sont-elles réelles ? Certains individus n’auraient-ils pas intérêt au maintien du statu quo ? Est-on vraiment sûr qu’aucune vie à l’extérieur ne soit possible ?
Nous n’en dirons pas plus ici, cela gâcherait le plaisir de la lecture. Le récit est captivant et très bien mené, ménageant suffisamment de rebondissements et de fausses pistes pour qu’il soit impossible de s’ennuyer. Au-delà de la dimension particulière à ce roman, il est intéressant de constater combien une large partie de la production de science-fiction contemporaine, aussi bien littéraire que cinématographique, a tendance à mettre en scène le même type de société et une aspiration forte à son renversement. En effet, qu’il s’agisse de Time Out ou d’Elysium par exemple, ou encore de Hunger Games ou La zone du Dehors, à chaque fois, nous avons affaire à des sociétés policières hyper hiérarchisées, presque des sociétés de castes, dans lesquelles le bien-être d’une poignée de privilégiés repose sur l’exploitation à outrance de la grande majorité. La rébellion de quelques-uns contre l’ordre établi provoque une véritable insurrection qui fait vaciller l’ordre social dans son ensemble.
Silo s’intègre pleinement dans ce type de récit, alliant critique écologique et critique sociale. L’ensemble se révèle être un dossier à charge contre le fonctionnement actuel de nos sociétés. Alors ne boudons pas notre plaisir !
Henri Clément