1 CD chez Fraca !!!
Exception faite du titre d’ouverture sur les violences policières, c’est dans l’intimité que, sur ce nouveau disque, le militantisme de Katel se fait le plus fécond. En 13 ans et quatre albums, cette autrice-compositrice-interprète a petit à petit délaissé le rock de ses débuts pour des sonorités plus personnelles. Cinq ans après le déjà superbe Élégie, la part belle est donnée aux voix et aux synthés, dans une maîtrise de production qui n’a pas oublié de se donner pour mission d’aller au plus près de l’émotion. C’est un fourre-tout, mais tout y est beau : fantaisie, sensibilité, ingéniosité, trouvailles sonores, paroles aussi rigoureusement poétiques que subtilement engagées, l’art d’oser tantôt l’aventure, tantôt la proximité avec la même réussite. À la tête de son propre studio d’enregistrement, elle y joue presque tout mais – jamais totalement seule – ne manque pas de camarades, notamment pour des envolées de cuivres et de cordes qui reviennent régulièrement nous emporter.
Labyrinthes accueillants
Succédant à une poignée de tubes en puissance aux mélodies particulièrement entêtantes se trouvent d’autres chansons beaucoup plus alambiquées mais ne déparant pas l’ensemble. Ce refus du formatage est à l’image des textes qui sont comme des labyrinthes dans lesquels on aime se perdre et se retrouver loin des discours verrouillés. Des thèmes récurrents reviennent en boucle : la nuit aux évocations contradictoires ; le jeu y compris quand c’est sérieux ; l’amour qui n’accepte aucune porte fermée ; des créatures hybrides tour à tour prédatrices ou proies. Dans ces saynètes profondes et ludiques les différentes espèces se mêlent, les corps se confondent (« merveilles » !) et même les organes (« mutants » !), à commencer par les yeux et les oreilles qui troublent les sens. Se pose alors la question primordiale du langage : crié ou chuchoté, encore des contrastes… et de la cohérence. Même si cette dernière peut avoir son revers : lorsque la voix s’arrête, la musique fait souvent de même et nombre de ces titres aux fins abruptes participent à nous faire regretter la courte durée de ce disque.
Katel a co-fondé le label Fraca !!! qui, selon ses mots, « se positionne clairement pour promouvoir la place des femmes dans la musique à tous les postes ». Non moins féministe, la chanson Rosechou (en un seul mot) est un chant de lutte pour la défense des différentes manières d’être et d’aimer, mais aussi un irrésistible prétexte à la danse, vecteur pour porter haut sa démarche d’affirmer sans opposer. Affirmation aussi, son « Qu’ouïr ? » sous ses faux airs d’interrogation. En pensant « on vous emmerde » mais en chantant « on vous emmène », Katel démontre l’importance des détails et opte in extremis pour l’option bisous contre les réacs. À nous d’en faire le tube du printemps !