Publié le Mercredi 22 novembre 2017 à 11h22.

Série : Capitaine Marleau

Diffusée sur France 3.  DVD saison 1, sortie le 22 novembre, 29,99 euros. 

«Quoi ? La capitaine trucmuche là ? Elle est chtarbée, non ? » C’est Yolande Moreau, la colonelle de gendarmerie en retraite qui parle ainsi de « capitaine Marleau », Corinne Masiero. Et le ton est donné d’entrée dans l’épisode « Chambre avec vue »… Il faut dire qu’une minute plus tôt un échange surréaliste avait eu lieu après que la colonelle eut réchappé d’un incendie : « Colonelle ! Vous n’êtes pas morte ! J’suis contente ! » Elle la serre dans ses bras… « Vous vous rappelez pas de moi ? Marleau, votre stagiaire y’a vingt ans ! J’ai pas tellement vieilli, quand on est moche, on vieillit pas, hein colonelle ! – Des stagiaires, j’en ai eus ! – Des comme moi, ça m’étonnero ! J’suis capitaine maintenant ! Oui, c’est dingue ! »

« Alors j’vais faire un p’tit peu d’enquête… » 

« Faudrait pas qu’on dise que j’fais des emplois fictifs, hein, camarade ! » en tapant sur l’épaule du pompier. Quand on aura précisé que « Capitaine Marleau » mène toujours ses enquêtes en civil, chemise à carreaux, écharpe tricotée, parka et chapka (en toutes saisons !) avec, quand même, un brassard « gendarmerie nationale », on comprendra l’effet inouï d’étrangeté qu’elle produit immanquablement de prime abord. 

Corinne Masiero (découverte avec Louise Wimmer en 2012) est exceptionnelle ici en assumant à 100 % un accent et un parler chti, des façons et des manières populaires... Les téléspectateurs ne sont pas restés longtemps dans l’expectative et ont très vite massivement adopté Capitaine Marleau : au mois d’octobre, l’audience mesurée a frôlé les 7 millions ! Immense succès donc, mais attention, nous n’avons pas affaire à une série consensuelle, qui s’avancerait sur des idées moyennes. C’est avec un profond humanisme que la série scanne la société française d’aujourd’hui. Autour d’un cadavre, ou de plusieurs cadavres, c’est d’amour qu’il sera question, du trop peu d’amour, de domination, de frustration, de révolte violente, de vieillesse et de folie…  D’enfance, de fragilité, de transmission aussi…  D’argent évidemment… 

Josée Dayan est à la réalisation, elle qui avait réalisé pour la télé un très beau Balzac avec G. Depardieu  et J. Moreau. G. Depardieu justement, J-P. Marielle et B. Ogier, V. Abril, P. Arditi, N. Arestrup, M. Robin, C. Berling apportent une belle contribution. Mais si Capitaine Marleau a maintenant un immense fan club, elle ne plaît pas à tout le monde. Elle dérange aussi, elle clive. Télérama n’a pas aimé…

Un succès de cette dimension ne s’explique pas en trois phrases 

Mais il certain que la liberté avec laquelle « Capitaine Marleau » mène ses enquêtes, mène sa vie – enfin, ce qu’elle nous en laisse deviner – y est pour beaucoup. Comme on voudrait s’affranchir comme elle de tous les codes qu’elle fracasse allègrement ! Comme elle est légère – elle se met à danser en certaines circonstances – sans jamais perdre de vue, teigne qu’elle est, que c’est la vérité qu’il faut faire surgir : « Non mais ! »« Merki pour tout ! »

Fernand Beckrich