Diffusion sur Netflix (une saison, 9 épisodes).
La série sud-coréenne Squid Game est en passe de devenir un des plus grands succès mondiaux. Au-delà ses qualités, il est permis de penser que cet engouement traduit un rapprochement des cultures et des peuples. Des spectateurEs qui vivent aux quatre coins de la planète parviennent à s’identifier aux mêmes personnages, à comprendre instantanément les mêmes codes. Un tel triomphe d’une réalisation venue d’un petit pays d’Asie aurait été inimaginable voici encore quelques décennies quand la culture cinématographique hollywoodienne était encore, sinon hégémonique, très largement dominante.
Renouvellement du thème des jeux sanglants
De quoi s’agit-il ? Des femmes et des hommes placés dans des situations insolubles sont amenés à se lancer volontairement dans une compétition à mort dans l’espoir de gagner une somme de 46,5 milliards de wons, soit environ 33 millions d’euros.
Le thème des jeux sanglants n’est pas original en soi et a déjà donné lieu à de nombreux films, parmi lesquels on peut citer Rollerball, Les Condamnés ou le Prix du danger de Boisset, voire les Chasses du comte Zaroff qui a connu plusieurs remakes. Mais le réalisateur Hwang Dong-Hyeok parvient à renouveler le genre. D’une part grâce sa galerie de personnages qui représente une sorte d’échantillon crédible des victimes de la société capitaliste contemporaine. ChacunE d’elles et eux est doté d’une véritable personnalité et d’un environnement social. D’autre part, en dénonçant au travers de ces jeux la concurrence féroce à laquelle le capitalisme pousse inexorablement les exploitéEs.
Une série profondément subversive
Loin de tomber dans la pornographie de la violence, il en souligne l’horreur. Squid Game aborde ainsi, mine de rien, des sujets comme le surendettement, qui sévit durement en Corée, le sort des migrantEs pakistanais, la situation des transfuges de Corée du Nord qui s’attendaient à trouver mieux. Il parvient même à évoquer la répression féroce d’une grève à laquelle a participé l’un des concurrents. Une séquence au cours de laquelle les joueurEs sont invités à voter pour décider s’ils et elles veulent continuer à risquer leur peau pour du fric apparaît comme une véritable parodie de la démocratie bourgeoise.
C’est cet aspect subversif qui donne son caractère universel à Squid Game et lui permet de sortir du cadre du film de genre. Squid Game s’inscrit dans le même esprit que les brûlots de Bong Joon-Ho comme Snowpiercer et Parasite. Par le jeu de certainEs acteurEs et certaines situations, cette série nous rappelle aussi les mélodrames italiens de la grande époque, tels que pouvaient en tourner Dino Risi ou Luigi Comencini. Si l’on ajoute que cette série, même si elle n’est pas parfaite, parvient à éviter le piège du délayage et des répétitions, que le scénario est bien construit et le suspense permanent, on comprend qu’il serait regrettable de s’en priver et qu’on attend avec intérêt une saison 2 aussi réussie.