Film tunisien, 1 h 32 min, sorti le 7 décembre 2022
« Qu’en un jour, qu’en un lieu, un seul fait accompli / Tienne jusqu’à la fin le théâtre rempli. » Boileau
Une figueraie de la campagne tunisienne. Des jeunes femmes travaillent à la récolte. Pour elles, c’est un job d’été. Leur journée de travail — la durée du film — se déroule dans l’ombre des figuiers, arbres majestueux au feuillage protecteur mais aux branches très fragiles.
À l’étouffée...
Sous le couvert, à chaque instant l’on peut percevoir la chaleur écrasante de l’été. Chaque geste, chaque déplacement, semble arraché à la torpeur des heures brûlantes de la journée. L’abri de l’épaisse frondaison est alors vital mais opère tel un lourd couvercle sur le petit théâtre du monde où se meuvent avec grâce ces jeunes femmes — un jeune homme aussi — au milieu de l’équipe permanente, plus terne et résignée.
Avec la légèreté qui sied à cet âge, les relations se nouent, au hasard d’une branche abaissée, d’un seau passé de main en main, d’un cageot rempli avec délicatesse — la figue est un fruit fragile... et sensuel. La gravité s’insinue lorsque nous sont révélés les difficultés et les drames de la vie de ces jeunes filles au travail. Le rapport aux hommes, qui de prime abord pouvait paraître presque ludique au travers de leurs chamailleries, est exposé crûment par l’irruption de manifestations banales mais violentes du patriarcat.
Beau comme une chanson...
Tout est beau dans ce film, sans esthétisme gratuit, simplement. C’est un fait. Le pays magnifique, ces arbres somptueux, les fruits qu’ils portent, à la rondeur et à la couleur parfaites. Et les personnages...
Les jeunes femmes affichent la beauté éclatante de leur insouciance — malgré tout. Les hommes, sont, eux aussi, très beaux. L’une des filles dit même du chef — un salaud ordinaire — qu’il est vraiment mignon. Les femmes plus âgées arborent la noblesse de leur visage splendide : la référente de l’équipe de cueilleurs, personnage complexe et ambivalent, ainsi que la très vieille femme dont les articulations sont au supplice. À noter que pas une de ces personnages, authentiques et fortes, n’est une actrice professionnelle.
Le plus beau, finalement, c’est la solidarité qui émane de cette tranche de vie. Les jeunes filles, après s’être défaites de leur tenue de travail, remaquillées, chantent à tue-tête dans la camionnette qui les éloigne du théâtre qui s’est joué là. À moins que ce ne soit la chanson du générique, à ne rater sous aucun prétexte...