Par la Commission nationale Ecologie du NPA
Avec un BTS agricole, le ministre de l’agriculture Stéphane Le Foll devrait pouvoir éviter les gaffes de son prédécesseur, Bruno Le Maire, qui ne savait pas le nombre de mètres carrés dans un hectare, mais il se rattrape avec le sexisme en se vantant de promouvoir des femmes dans son ministère « bien que les dossiers soient très techniques ».
Quelques mesures médiatiques, comme le retrait de l’autorisation de mise sur le marché du Cruiser pour le colza (mais pas pour le maïs) et la promotion de l’agro-écologie, ne peuvent masquer la continuité avec la politique du précédent gouvernement. Parmi les nombreux pesticides toujours autorisés, on trouve la deltaméthrine, une substance active 10 800 fois plus toxique le DDT. Le plan de réduction de l’utilisation des pesticides ne s’accompagne d’aucune mesure contraignante. Mais Le Foll avait prévenu dès son entrée en fonction qu’il privilégierait le pragmatisme et que la réduction prévue lors du Grenelle de l’Environnement ne serait pas tenue.
Le gouvernement s’engage à arrêter le soutien aux agro-carburants de première génération, mais dans le même temps maintient l’agrément qui permet aux industriels du secteur (dirigé par Xavier Beulin, patron de la FNSEA) d’empocher 54 millions d’euros d’aides fiscales.
Les négociations européennes pour la PAC 2014-2020 sont elles aussi dans la continuité. Le Foll a reconnu l’importance du « verdissement » de la PAC, mais dans la flexibilité. Alors que 20 % des agriculteurs touchent 80 % des subventions, celles-ci seraient « limitées » à 300 000 euros par exploitation ! Ce sont ces primes qui permettent aux gros propriétaires fonciers de s’enrichir sur notre dos, et de manger les plus petits. On va donc continuer avec une situation injuste et inégalitaire qui favorise les grosses exploitations et certaines productions comme le maïs irrigué, et ignorent le maraîchage ou l’arboriculture.
Le ministère se gargarise du fait que les agriculteurs français sont plus jeunes que la moyenne européenne, mais les moins de 40 ans n’en représentent que 19 %. Et rien dans la politique du gouvernement n’est fait pour inverser la tendance et permettre à des jeunes de s’installer. Le prix du foncier agricole n’a plus aucun lien avec la valeur agricole des terres, mais est déterminé par la spéculation et la valeur des primes. 25 % des exploitations ont disparu en dix ans.
Quant aux industriels, Doux avait touché 54 millions d’euros d’aides en 2011, ce qui ne l’a pas empêché d’être mis en liquidation, en laissant des centaines de salariés et d’éleveurs sur le carreau. Cette faillite a montré les effets néfastes du système de l’intégration des agriculteurs et des éleveurs en filière. Pourtant, c’est ce système qui continue à être privilégié avec le soutien aux industriels et à des coopératives qui n’en ont plus que le nom, ainsi que les primes à l’exportation qui ruinent les producteurs des pays du Sud.
La forêt, elle, n’est vue que comme une opportunité de dynamisme économique. Planter et couper sont les seules ambitions. Aucune place n’est laissée pour des forêts naturelles. Quant à la promotion du bois pour le chauffage, elle s’accompagne d’une hausse de la TVA qui touche particulièrement les plus démunis.
La France s’est battue pour augmenter les prises de poissons des eaux profondes pour protéger la flotte d’Intermarché. Pourtant, ces espèces sont particulièrement à risque à cause de leur longévité et de leur faible reproductivité. De plus, les chaluts détruisent les fonds marins et des écosystèmes très fragiles. Dans le même temps, les aires marines, dont François Hollande s’était fait le chantre en annonçant la création du Parc des estuaires picards et de la Mer d’Opale, voient leur budget amputé et les projets annoncés vidés de leur substance. Malgré les annonces internationales, les cétacés du Sanctuaire des Antilles ne seront protégés que sur le papier.
Entre austérité et intérêts économiques, l’écologie n’est pas plus une priorité pour ce gouvernement que pour le précédent. La terre n’est perçue que comme une source potentielle de profit qui doit être exploitée, comme les travailleurs, jusqu’à épuisement. On est très loin du changement nécessaire : socialisation des entreprises de l’agroalimentaire, retour à une agriculture paysanne non chimique et locale, fin des aides à l’exportation et refondation de la PAC.