Publié le Mardi 3 mai 2016 à 12h15.

Pologne 1956-1957 : la révolution interrompue

L’année 1956 vit un soulèvement ouvrier en Pologne, d’abord à Poznan en juin, puis à Varsovie en octobre. Alors que des conseils ouvriers se constituaient un peu partout, les Soviétiques firent le choix de composer avec les dirigeants locaux en appelant au pouvoir un ancien secrétaire général du parti, Gomulka, populaire car proscrit pendant quelques années. Il réussit à désamorcer le mouvement de contestation.

Ce qui a été le début d’une révolution antistalinienne en Pologne en 1956 a mis en avant trois aspects : la question sociale, qui est celle d’une société sans classes, égalitaire, capable d’assurer les besoins matériels et culturels de la population ; le problème national, celui de la souveraineté du pays, de la garantie d’échanges internationaux équilibrés ; et l’aspect démocratique, qui concernait tant la démocratie dans « le parti » que la gestion de la production et les choix de développement économique.

A ces trois questions profondément entremêlées, une nouvelle gauche antistalinienne a commencé à formuler une réponse, celle de l’autogestion, c’est-à-dire des conseils ouvriers (ou des travailleurs) dans les entreprises et de leur coordination.

 

Conséquences de la déstalinisation

Après la mort de Staline et la liquidation de Beria en URSS, les réseaux est-européens de la police politique, dirigés jusque-là par Beria, commencent à être repris en main. Craignant pour son avenir, le colonel Jozef Swiatlo1 passe à l’ouest et commence à raconter sur RFE (Radio Free Europe) la terreur stalinienne dont il était un des artisans2. Sa fuite et ses aveux radiodiffusés imposent alors une réorganisation du système de la police politique en Pologne, tout en ayant un grand  impact dans la population. Le climat de terreur commence à se fissurer.

Au sein du parti dominant, le Parti ouvrier unifié polonais (POUP), les divisions apparues dans l’appareil avaient permis que s’expriment les premières dissidences, remettant en cause tant la répression stalinienne3 que la politique de gabegie économique. Par exemple, en 1955 dans l’usine automobile FSO-Zeran, à Varsovie, Lechoslaw Gozdzik, un militant de base de 24 ans, est élu secrétaire du comité du POUP de l’entreprise – un poste réservé à la nomenklatura – contre le candidat officiel. Le nouveau rédacteur en chef de l’hebdomadaire de jeunesse, Po Prostu (Tout simplement), commence à publier des articles critiques et des analyses de la situation. Un courant de gauche antistalinien naît dans le parti.

Le premier secrétaire du parti, Boleslaw Bierut, tombé malade après le rapport Khrouchtchev du XXe Congrès du PCUS, est mort à Moscou le 12 mars 1956. La lutte pour sa succession fait apparaître au sommet deux fractions, conservatrice et réformatrice. C’est dans ce cadre qu’est prise la décision de diffuser le rapport Khrouchtchev dans le parti, ouvrant la porte aux débats.

Gozdzik raconte : « En avril, nous avons eu une conférence des activistes de Varsovie (…) J’ai parlé de l’atmosphère dans l’organisation, ce que les gens disent, à propos des relations polono-soviétiques, comment nous voyons ça, la question de la souveraineté de la Pologne (…) J’ai été pris à partie : qu’est ce qu’il raconte, contre-révolution, après un tel discours il n’est bon qu’à être transformé en fourrage (…) Et Ochab4 a pris la parole, il a dit que c’est la voix du peuple, que ce que le camarade Gozdzik dit, il le dit au nom du peuple, de la classe ouvrière, car il en est, il l’écoute et ce qu’il nous a présenté, nous devons le prendre en compte (…) Après cette conférence j’ai fait une réunion ouverte (…) Les gens s’emparaient de chaque mot, de chaque texte que nous présentions, les masses s’étaient engagées. »5

Un réseau horizontal, regroupant les comités du parti de plusieurs grandes entreprises, des intellectuels, des étudiants, la rédaction de Po Prostu, tissant des liens en province, surgit. Il soutient les réformateurs de l’appareil, mais agit aussi sans leur accord.

 

Grève et insurrection à Poznan

Le 28 juin 1956, les 10 000 travailleurs de la principale grande entreprise de Poznan se mettent en grève et manifestent, alors qu’une foire internationale se tient dans la ville. Ils revendiquent depuis plusieurs mois une hausse des salaires ainsi que l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail. Un groupe de dirigeants ouvriers se forme et prend contact avec les autres entreprises. La mise en marche de la sirène de l’entreprise est le signal de ralliement à la manifestation. Il y a entre 30 000 et 50 000 protestataires. A côté des revendications matérielles, des slogans politiques sont scandés : « A bas l’exploitation du travail, à bas les sangsues, à bas la bourgeoisie rouge ! », « Nous ne voulons pas d’un tel parti ! », « Dehors les Russes ! », « Elections libres ! ». Les manifestants occupent les locaux du parti et des autorités, inscrivent sur le bâtiment du comité régional du parti « Du pain et la liberté ! », attaquent la prison et libèrent les prisonniers, désarment des policiers et assiègent le bâtiment de la Sureté, où les machines permettant de brouiller la radio sont détruites et où les manifestants répondent par les armes aux tirs de la police politique.

Les autorités décident de briser la révolte par la force : environ 10 000 soldats et 400 chars occupent la ville, il y a plus de 80 morts (dont huit soldats et policiers), au moins 250 blessés, plus de 700 personnes arrêtées, 274 (dont 196 ouvriers) emprisonnées. Des tirs sporadiques entre révoltés et forces de répression durent jusqu’au 30 juin.

La propagande du régime parle d’abord des « impérialistes qui ont profité de la Foire pour passer des armes en contrebande », « tromper les ouvriers » et les « pousser à des excès ». Le premier ministre Cyrankiewicz, ancien social-démocrate, proclame à la radio locale que ceux « qui ont levé la main sur le gouvernement populaire doivent savoir que cette main leur sera coupée »

Ce discours officiel ne passe pas. La nouvelle gauche communiste explique qu’il s’agit d’une protestation ouvrière et non d’une contre-révolution. Les travailleurs, qui se sont radicalisés, exigent « une véritable déstalinisation » et un changement de direction. Le nom de Wladyslaw Gomulka – un ancien dirigeant du parti, écarté pour « déviation nationaliste droitière » en 1948, emprisonné de 1951 à 1954 et exclu du parti, qui n’a été réhabilité qu’en avril 1956 et réadmis dans le parti seulement après l’insurrection de Poznan – est de plus en plus mis en avant par les masses.

Les assemblées générales dans les entreprises se multiplient, exigeant des augmentations de salaire, la diminution des exportations de denrées alimentaires, la journée du travail de six heures, et menaçant de faire grève. Comme cela a été formulé par un ouvrier : « les événements de Poznan ont été un cri des ouvriers, qui en ont assez des mensonges et de la misère »6

Les procès de ceux qui ont été emprisonnés doivent se dérouler en public et même être ouverts aux journalistes étrangers. L’avocat des emprisonnés accuse les autorités d’avoir provoqué les événements de Poznan et de porter la responsabilité des morts. Les condamnations sont moins lourdes que d’habitude7.

 

L’Octobre polonais

Les travailleurs s’organisent. En septembre, dans l’usine FSO, à l’initiative de l’organisation locale du parti, mais contre l’avis de la direction régionale, un conseil de délégués ouvriers est élu avec pour but de prendre la direction de l’entreprise. Le projet d’autogestion adopté stipule : « le conseil d’autogestion planifie la production (plan étatique d’un an seulement), décide quel pourcentage des revenus de l’usine va aux investissements, combien doit être partagé au sein du personnel, le ministère nomme le directeur seulement sur proposition du conseil »8. Gozdzik se souvient : « c’est difficile de dire qu’il s’agissait de quelque chose d’organisé, c’était la spontanéité. Des délégations de diverses entreprises venaient nous voir et c’est ainsi que chez nous s’est mis en place une sorte d’état-major (…) Des délégués de tout le pays arrivaient. »

Consciente de sa rapide perte de légitimité, la direction du parti fait le choix d’appeler Gomulka. En septembre, il est coopté au comité central. La direction du parti prépare le 8e plénum du comité central, qui doit modifier à la fois le bureau politique du parti – la véritable direction de l’Etat – et l’orientation politique et économique. Cela implique de nouveaux rapports avec l’URSS.

Lors de la session du bureau politique du 12 octobre 1956, Gomulka (pas encore membre, invité, mais déjà donnant le ton) le formule ainsi : « pourquoi est-ce nous qui avons payé les réparations des Allemands pour la guerre ? On nous a expliqué qu’une partie du territoire allemand est devenue polonaise, mais nous n’étions pas des alliés des Allemands durant la guerre, et s’il y a eu un changement des frontières, ce n’est pas à nous de le payer (…) Les réparations pour les Terres Recouvrées ont été prises, sous forme de charbon et sous celle des démontages [d’usines] (…) Je pense que les camarades soviétiques devraient le comprendre et nous rendre ce qu’ils nous doivent. Je pourrais ne pas le mentionner si la situation économique ne nous y forçait pas (…) Notre raison d’Etat polonaise et le fait que, comme eux, nous construisons le socialisme, exige que nos relations ne soient pas conflictuelles, mais différentes de ce qu’elles ont été jusque là. »9 Dans son discours, il s’adresse au maréchal Rokossowski10 – une façon d’insister sur l’absence de souveraineté de l’armée polonaise.

Pour la bureaucratie soviétique, c’était inacceptable. Khrouchtchev réagit en convoquant le BP du POUP à Moscou, mais ce dernier refuse de s’y rendre. A la veille du plénum, Rokossowski fait marcher en direction de Varsovie les troupes polonaises qu’il commande. Les forces russes qui stationnent en Pologne font également mouvement vers la capitale, d’autres se regroupent sur les frontières allemande et soviétique, la marine russe bloque les ports. Le matin du 19 octobre, alors que le plénum doit commencer, Khrouchtchev, à la tête d’une délégation comprenant Koniev, le chef des armées du Pacte de Varsovie, arrive à Varsovie. « Nous sommes décidés à intervenir brutalement dans vos affaires et nous ne permettrons pas la réalisation de vos  intentions », dit-il.

Face à cela, il y a une mobilisation unanime des ouvriers et des étudiants. Des meetings et des assemblées se tiennent sans interruption. De plus, une partie de l’armée – le Corps de sécurité intérieure (KBW) –, dirigée depuis août par le général Waclaw Komar, un ancien de la guerre d’Espagne, qui sortait de prison après avoir été accusé de « trotskisme » et torturé, avait établi des liens avec « l’état-major » des travailleurs à Zeran. Des officiers participent aux assemblées ouvrières et annoncent : « si on nous ordonne de tirer, on ne le fera pas, on changera le commandant ».

Les forces du KBW, beaucoup plus faibles que celles de Rokossowski, décident de faire face. Komar raconte plus tard : « le 19 octobre, nous avions deux tâches. Premièrement, assurer la direction de l’Etat et du parti, faire qu’elle dispose d’une force qui puisse résister à la pression militaire soviétique et, en même temps, ne permette aucune provocation antisoviétique. Deuxièmement, assurer la direction soviétique que sa tentative de régler le problème politique par des moyens militaires fera face à notre résistance décidée et donc sera coûteuse de tout point de vue. Du point de vue militaire, les "forces de Rokossowski" avaient une supériorité écrasante. Mais elles savaient qu’elles paieraient leur victoire par des pertes importantes. »11

De plus, les travailleurs de FSO et d’autres entreprises, armés par le KBW, vont au devant des armées qui marchent sur Varsovie. Selon le secrétaire du parti de la ville, Stefan Staszewski, qui a passé huit ans dans les camps de Kolyma, « ils ont eu pour tâche de défaire politiquement cette armée (…) Les ouvriers ont pénétré leurs rangs, ont commencé l’agitation et cette armée s’est vraiment arrêtée. » Les ouvriers érigent aussi des barricades aux entrées de la ville. L’affrontement militaire n’a pas lieu.

 

Concessions, reprise en main et répression

Après une journée de discussions avec Gomulka, qui n’est pas encore membre du BP, la délégation soviétique repart. Trois jours plus tard, Khrouchtchev affirme que s’il aurait été facile de lancer une intervention militaire en Pologne, il aurait été très compliqué de la terminer. Le 8e plénum élit Gomulka au poste de premier secrétaire. Le prix de vente du charbon polonais à l’URSS est relevé. Les généraux russes quittent la direction de l’armée polonaise. Les « boutiques aux rideaux jaunes » réservées à la nomenklatura sont supprimées. Les paysans se voient reconnaître le droit de dissoudre les anciennes coopératives obligatoires, le cardinal Wyszynski, primat de Pologne, interné depuis 1953, est libéré le 26 octobre…

Promettant une nouvelle politique, Gomulka est applaudi le 24 octobre par des centaines de milliers de personnes, lors d’un meeting à Varsovie. Au 8e plénum, il avait dit à propos de Poznan : « les raisons de la tragédie de Poznan et du profond mécontentement de la classe ouvrière sont en nous, dans la direction du parti, dans le gouvernement. » La nouvelle direction conquiert sa légitimité et Gomulka devient immensément populaire. Il intègre le comité du POUP de l’usine Zeran, dont Gozdzik est le secrétaire. En janvier 1957 des élections, avec des listes « élargies » mais toujours uniques, donnent lieu à une participation massive. Sur la liste de Varsovie-Praga, Gomulka est premier et Gozdzik septième… pour six places, alors que le nouveau premier secrétaire avait appelé – et son appel a été suivi – à « ne rayer aucun nom », c’est à dire à n’élire que les premiers de la liste.

Une loi légalisant les conseils ouvriers dans les entreprises est adoptée le 19 novembre, mais elle en limite la portée : si le conseil doit « diriger au nom du personnel l’entreprise qui est une propriété de toute la nation », il « adopte des résolutions dans le cadre des droits de l’entreprise décidés par le Conseil des ministres ». Il a « le droit de proposer la nomination ou la révocation du directeur et de ses adjoints », mais c’est « l’organe d’Etat approprié » qui nomme le directeur et ce dernier est « membre de droit » du conseil ouvrier. De plus, le directeur a « l’obligation de suspendre la décision du conseil ouvrier si elle est contraire au droit ou au plan en vigueur ». En fait, la loi établissait que le pouvoir du conseil ouvrier dépendrait du rapport des forces : tant que les travailleurs resteraient mobilisés, le conseil s’imposerait, mais dès leur démobilisation tout redeviendrait comme avant. 

Pendant plusieurs mois encore les conseils ouvriers iront de l’avant, cherchant à se coordonner en tenant des conférences régionales et à imposer une seconde chambre du parlement, élue par les conseils ouvriers. Mais « les organes d’Etat appropriés » réussirent à les bloquer. La normalisation commença.

L’intervention militaire en Hongrie indiquait aux yeux d’un grand nombre « les limites à ne pas dépasser ». Peu à peu, les grèves furent à nouveau réprimées. L’hebdomadaire Po Prostu fut interdit en septembre 1957. La loi sur les conseils ouvriers les remplaça en 1958 par des « conférences d’autogestion ouvrière », au sein desquelles les délégués ouvriers étaient soumis aux représentants du parti, du syndicat officiel et de la direction. Gozdzik fut remplacé à la direction du parti de son usine fin 1957, et exclu du parti en 1959. Les généraux qui en octobre avaient préparé la résistance du KBW se retrouvèrent sur une liste noire de 17 noms. Ils furent progressivement déplacés, puis éliminés.

A l’opposé de la gauche antistalinienne polonaise, qui voyait dans « l’Octobre polonais » une « révolution », Gomulka déclara le 20 décembre : « nous n’avons fait aucune révolution, car il n’y avait aucune révolution chez nous et personne ne se donnait pour but de réaliser une révolution quelconque. Nous ne faisons que changer nos méthodes du travail »12.

L’alliance de la nouvelle gauche avec les réformateurs de l’appareil a permis d’imposer des changements et d’empêcher l’intervention de l’armée, mais les intérêts des travailleurs et de l’appareil bureaucratique – même quand ils se retrouvaient dans une même cellule du parti – étaient opposés. La nouvelle gauche antistalinienne, peu expérimentée, trop confiante dans les réformateurs du parti, inconsciente de la nécessité de s’organiser de manière indépendante pour pouvoir avancer, n’a pas été capable de passer à « la seconde étape de la révolution », malgré les tentatives de structurer le mouvement national des conseils ouvriers. Les leçons de la nécessaire indépendance de la classe ouvrière aboutiront pourtant, près d’un quart de siècle plus tard, à la fondation d’un syndicat indépendant et autogéré… et à un nouveau processus révolutionnaire.

Jan Malewski

 

  • 1. Swiatlo avait été envoyé à Berlin en décembre 1953 pour organiser la liquidation de la journaliste Wanda Bronska, fille de militants polonais, qui avec ses parents avait accompagné Lénine lors de son retour en train de Suisse en Russie, en 1917. Ses parents avaient été fusillés lors des procès de Moscou en 1938, et elle-même déportée à Magadan. Libérée à la fin de la guerre, devenue journaliste en Pologne puis en Allemagne de l’Est, elle était passée à Berlin-Ouest en 1949, puis avait travaillé pour Radio Free Europe (RFE), où elle décrivait les conditions des camps de concentration soviétiques.
  • 2. Il avait personnellement arrêté et torturé des dirigeants de la résistance polonaise, et procédé aux arrestations des dirigeants du régime écartés par Staline : l’ancien premier secrétaire du parti W. Gomulka (en 1951) et le maréchal Michal Rola-Zymierski (en 1955), qui avait dirigé l’Armée populaire à partir de 1944.
  • 3. Par l’ordre n° 00485 du 11 août 1937 de N. Iejov, 139 835 Polonais se trouvant en URSS ont été condamnés, dont 111 091 exécutés et 28 744 envoyés dans des camps. Plus de 100 000 ont été déportés en Sibérie. En août 1938, le Parti communiste de Pologne (KPP) a été dissous par le Komintern sous la (fausse) accusation de « trotskisme » et ses dirigeants en exil en URSS ont été liquidés (70 membres et suppléants du comité central). A la suite du pacte Staline-Hitler, qui a permis à l’URSS d’envahir le 17 septembre 1939 les territoires orientaux de l’Etat polonais, en 1940-1941 des centaines de milliers de ses citoyens – selon les sources, entre 320 000 et 800 000 – ont été déportés au-delà de l’Oural, 125 000 soldats polonais ont été emprisonnés dans des camps, 110 000 citoyens ont été emprisonnés… Environ 115 000 de ces victimes de la répression stalinienne ont eu la vie sauve en rejoignant l’armée organisée avec l’accord de Staline par le général Anders, à partir d’août 1941 ; évacuée vers l’Iran en 1942, cette armée a ensuite combattu au Proche-Orient et en Italie. 30 000 autres ont pu rejoindre l’Armée populaire polonaise, formée en URSS à partir de mai 1943 par le général Berling, qui a participé aux côtés de l’armée soviétique à la marche sur Berlin. En 1945-1947, 266 000 personnes déportées ont été transférées en Pologne. Ainsi, autour de 300 000 citoyens de la Pologne populaire avaient subi la répression stalinienne avant la formation de ce nouvel Etat en 1944. Par la suite, la terreur a touché non seulement ceux qui s’opposaient au nouveau régime, mais aussi ceux qui l’ont fondé ou qui se sont permis des critiques. Outre les arrestations et les condamnations, 5 200 000 citoyens (près d’un cinquième de la population) ont été fichés par le Ministère de la sureté publique après avoir été interrogés entre 1944 et 1955.
  • 4. Edward Ochab, premier secrétaire du parti après la mort de Bierut, considéré comme « centriste » entre les conservateurs et les réformateurs de l’appareil.
  • 5. Lechoslaw Gozdzik, « Bylismy u siebie » (Nous étions chez nous), Kurier Polityczny n° 396 d’octobre-décembre 1996. Les citations suivantes de Gozdzik viennent du même texte.
  • 6. Rapport de la police politique cité dans : Pawel Machcewicz, Polski rok 1956, Oficyna wydawnicza Mowia Wieki, Varsovie, 1993, p. 141.
  • 7. Des peines de deux à six ans de réclusion criminelle et même deux acquittements ont été prononcées lors des deux premiers procès, en septembre. Il n’y a pas eu de jugement lors du troisième procès, commencé le 5 octobre.
  • 8. Cité dans Zycie Gospadracze n° 51-52, 21-28 décembre 1980.
  • 9. Cité dans : Gomulka i inni, Dokumenty z archiwum KC 1948-1982, Aneks, Londres 1987, pp. 93-94.
  • 10. Konstantin Rokossowski, membre du Parti bolchevique depuis mars 1919, a été emprisonné et torturé lors des grandes purges, de 1937 à 1940, refusant d’avouer être « un agent polonais et japonais ». Il est libéré et réintégré dans l’Armée russe après les échecs de cette dernière en Finlande, lorsque Staline a besoin d’officiers qualifiés. Il a joué un rôle clé lors de la défense de Moscou, dirigé l’armée russe à Stalingrad (il reçut la reddition de maréchal Paulus) et lors de la batille de Koursk. Nommé maréchal de l’URSS en juin 1944, il a commandé le deuxième front biélorusse qui a pris le nord de Berlin et fait jonction avec l’armée américaine de Montgomery. Après la guerre, il commande le groupe nord de l’armée soviétique à partir de Legnica (Pologne). Le 6 novembre 1949, à le demande de Staline, il est nommé ministre de la Défense de la République polonaise et maréchal de Pologne. En 1950, il devient en plus membre du BP du POUP et en 1952, vice-premier ministre. Non réélu au BP du POUP en octobre 1956, remplacé comme ministre de la Défense en novembre, mis à la retraite avec maintien de son salaire, il quitte la Pologne en décembre avec 500 autres soviétiques, dont 120 avaient des postes de commandement dans l’armée polonaise (34 généraux sur 66). De 1958 à 1962, il sera vice-ministre de la Défense de l’URSS.
  • 11. Cité par Zbigniew Kowalewski, « 1956 – Pazdziernikowi generalowie » (1956 – les généraux d’octobre), Le Monde Diplomatique – Edycja polska, octobre 2011.
  • 12. Cité par Z. Rykowski et W. Wladyka, Kalendarium polskie 1944-1984, Varsovie, 1987, p. 48.