Pendant la Première Guerre mondiale, 2 400 « poilus » français ont été condamnés à mort et plus de 600 « fusillés pour l’exemple » (hors exécutions sommaires), les autres ayant vu leur peine commuée en travaux forcés. Prononcées pour refus d’obéissance, mutilations volontaires, désertion, abandon de poste devant l’ennemi, délit de lâcheté ou mutinerie, ces condamnations ont longtemps été cachées par les autorités militaires et l’État français.
Il faudra attendre 1998 pour qu’à l’occasion du 80e anniversaire de l’armistice, un représentant de l’État, Jospin, à l’époque Premier ministre, souhaite que les soldats « fusillés pour l’exemple », « victimes d’une discipline dont la rigueur n’avait d’égale que la dureté des combats, réintègrent aujourd’hui, pleinement, notre mémoire collective nationale ». Mais jusqu’à aujourd’hui, rien n’est vraiment réglé.
Ainsi deux artistes, Jacques Cohen, sculpteur, et Antoine Rubinat, peintre, ont décidé de mener une campagne de signatures autour de deux œuvres d’art afin de demander la réhabilitation des « fusillés pour l’exemple ». En ce sens, ils ont écrit à François Hollande, dont « l’état-major particulier » leur a répondu : « très attaché au devoir de mémoire et sensible à votre démarche, le chef de l’État m’a confié qu’il avait bien pris note de votre attente. Cependant, il n’est pas envisagé de recourir à de nouvelles dispositions pour la reconnaissance des conditions extrêmes ayant conduit ces soldats à faillir à leur devoir ».
Chacun appréciera la clarté, voire la violence, de la formule employée par le représentant de l’État : « la reconnaissance des conditions extrêmes ayant conduit ces soldats à faillir à leur devoir »... Pour cette fine plume, il n’y a visiblement aucun doute : entre 1914 et 1918, la hiérarchie militaire et l’État français avait, eux, un sens du « devoir » bien prononcé !