Les élections municipales sont une des élections les plus suivies par les électrices et électeurs. Elles sont un moyen de porter à l’échelle locale des revendications politiques concrètes et anticapitalistes.
Même si l’abstention y sera sans doute importante, les municipales ne sont pas comparables aux européennes sur ce point. Elles sont un moment où les classes populaires tendent un peu plus l’oreille que d’habitude aux questions politiques. Il y a donc un intérêt à en être.
Quelle approche ?
Dans les grandes villes de France, mais aussi dans les villes moyennes, il est intéressant de construire des listes anticapitalistes – y compris unitaires. D’abord parce que cela est un effort militant utile qui nous pousse à rencontrer nos sympathisantEs. Ensuite parce qu’à l’échelle d’une ville il est possible de créer de petites dynamiques autour de campagnes simples et efficaces, compréhensibles par toutes et tous.
Les listes anticapitalistes ne peuvent toutefois pas se contenter de parler local. Il est nécessaire de faire le lien avec les questions nationales et internationales. Disons-le tout net : les listes aux municipales qui promettent des programmes localistes ambitieux sans remettre en cause ni l’État et les coupes budgétaires, ni la politique du gouvernement, nous racontent de belles histoires. En réalité, si l’on s’en tient à une logique gestionnaire ou réformiste, il n’est pas possible de faire beaucoup de choses à la tête d’une municipalité. Être de gauche c’est donc assumer très clairement une volonté de rupture dès le début : notre programme est un programme de lutte, il n’est pas applicable dans ces institutions, y compris locales. Dire l’inverse, c’est prendre un double risque : celui de trahir ou celui d’échouer.
Par ailleurs, dans le cadre des campagnes soutenues par le NPA, la possibilité de gagner électoralement est extrêmement mince. L’enjeu est donc aussi – et surtout – de battre la campagne de ses idées et de renforcer notre courant politique partout où cela est possible (recrutement de militantEs, développement de l’audience, obtention d’éluEs pour continuer ce combat après les élections).
Quels axes de campagne ?
Les axes de campagnes peuvent être multiples mais l’activité du NPA sur l’ensemble du territoire ainsi que les campagnes nationales que nous menons permettent de proposer ici plusieurs options.
1. La lutte contre les politiques d’austérité. Les listes anticapitalistes s’opposent au gouvernement Macron et à sa politique. Elles se font l’écho des luttes contre la réforme des retraites, l’assurance chômage, la précarité étudiante, etc.
2. Pour des villes écosocialistes. Le NPA met en avant les logiques de gratuités. La gratuité est un moyen de s’attaquer à la marchandisation du monde et de mettre en avant la valeur d’usage. Transports publics gratuits, crèches gratuites, cantines gratuites par exemple, nous revendiquons également les développements des transports doux (vélo, marche), la sortie du nucléaire, les cantines bio et locales, la végétalisation des villes.
3. Pour des villes féministes. Anticapitalistes et féministes, nos listes portent des revendications en ce sens. Par exemple, nous revendiquons la mise en place de centre d’accueil pour les femmes victimes de violences. Nous revendiquons aussi de rebaptiser nombre de rues pour les féminiser.
4. Pour des villes de solidarités. Forcément, une ville anticapitaliste se doit d’accueillir toutes celles et ceux qui le souhaitent. En cela, nous appliquerons la loi de réquisition des logements vides afin de loger tout le monde. Nous affirmons être pour la liberté de circulation et d’installation. Il est aussi possible de mettre en place des services publics municipaux qui répondent aux besoins en nourriture par exemple.
5. Contre la ville sécuritaire. Prendre position contre les polices municipales et la vidéo-surveillance est le B.A.BA pour une liste anticapitaliste.
6. Démocratie : l’échelle locale est la bonne échelle pour défendre, par exemple, la revendication de révocabilité des éluEs. Nous pouvons aussi rappeler notre souhait de la proportionnelle intégrale et du plafonnement du salaire de l’éluE au niveau du salaire moyen de la population.
7. Enfin nous revendiquons être des listes internationalistes. En cela nous apportons notre soutien aux peuples en lutte en Palestine, au Chili, en Algérie… ainsi qu’aux luttes décoloniales, notamment en Kanaky.
Bien entendu, ces revendications peuvent être partiellement reprises par d’autres listes qui ne se situent pas sur le terrain de l’anticapitalisme. C’est le cas par exemple des bus gratuits. C’est pourquoi nous devons systématiquement faire le lien entre ces revendications et la question du pouvoir. Poser la question du pouvoir, pas comme le pouvoir d’un parti, mais pour faire la démonstration qu’une minorité décide (mal) de nos vies. Nous avons coutume de demander : « qui produit ? Pour quoi faire ? Dans l’intérêt de qui ? », pour démontrer l’absurdité de l’activité économique capitaliste du point de vue de la répartition des richesses et de la crise écologique. Mais nous pouvons en faire autant lorsque l’on nous dit : « votre programme n’est pas réaliste ! ». Dans une logique gestionnaire, par et pour la bourgeoisie, en effet, notre programme fait tâche. Reste alors à poser les questions : « Qui dirige ? Pour quelle politique ? Pour quels intérêts ? ». Il faut inverser la logique pour montrer l’illégitimité de ces institutions pour les classes populaires. Elles sont précisément taillées pour que nous ne puissions pas mettre en place un programme anticapitaliste. Il faut alors les dénoncer et les combattre.
Des revendications de bon sens… pour aller plus loin !
Aussi, si les revendications proposées paraissent compatibles avec celles des réformistes, elles ne le sont pas dans la démarche politique. À titre d’exemple, lorsque nous faisons des transports publics gratuits notre revendication centrale, ce n’est pas pour s’arrêter à l’aspect utilitaire et pratique de la gratuité des transports publics. C’est aussi parce que nous considérons que cette revendication permet de poser l’amorce de la société que nous voulons. C’est-à-dire une société où le déplacement est un droit universel pour toutes et tous. Une société où les pratiques changent : c’est gratuit, on ne se pose plus la question de payer. Une société où le statut des gens changent : avec la gratuité, pas besoin de prouver sa pauvreté pour payer le bus moins cher. On retrouve donc une forme de dignité dans la gratuité.
Si l’on développe les gratuités à l’échelle d’autres services, on voit bien qu’il est possible de mettre sur la table les prémices de ce que serait l’éco-socialisme. Concrètement, cela permet de discuter de l’alternative politique en positif. Et ça manque parfois dans notre approche.
Notre programme politique est également anticapitaliste dans le sens où les mesures mises en avant sont des moyens de porter des coups politiques (partiels) à l’appareil répressif de la bourgeoisie. Nous revendiquons, y compris à l’échelle locale le démantèlement de la police et en particulier la dissolution des polices municipales. Celles-ci sont à la charge seule des municipalités. Nous sommes pour le désarmement global de la police au contact de la population. Les élections municipales permettent de discuter de cela. Le désarmement dans le cas de la PM est insuffisant ; il faut la dissoudre car une police municipale peut se transformer en milice du maire… dans un contexte où l’extrême-droite et la droite dure (et même LREM) sont en passe de remporter des villes avec leurs lots de coups bas pour les classes populaires.
En conclusion : une campagne 100% à gauche car « Nos vies valent plus que leurs profits ! »
Si les luttes sociales de décembre/janvier sont la priorité pour les anticapitalistes, préparer cette échéance a du sens car il est important de montrer à une échelle de masse qu’une alternative radicale est possible : d’autant plus avec ce mouvement social. Par ailleurs, les municipales sont des élections qui permettent de mettre en avant un collectif de candidats et pas seulement une tête d’affiche. Le côté « sauveur suprême » est moins présent (du moins si on le souhaite).
Dans ce contexte nos listes anticapitalistes doivent être ouvertes au mouvement social afin d’y faire figurer des syndicalistes, des militantEs, des sympathisantEs…
Très clairement, c’est aussi l’occasion de renforcer l’anticapitalisme dans nos villes, de structurer des collectifs militants, de porter sur la place publique un certain nombre de propositions et un projet de société alternatif.
C’est un travail militant qui nécessite du temps et de l’énergie. Mais comme le NPA a su trouver 500 parrainages pour être présent à la présidentielle, nous devrions savoir rassembler quelques dizaines de candidats pour être présents aux municipales. Cela nécessite un programme crédible car ancré dans les mobilisations en cours, et un profil politique ouvert et unitaire pour rassembler largement au-delà de nos rangs.
C’est possible. Tâchons de nous en donner les moyens.