Éditions Anamosa, 2024, 448 pages, 26 euros.
L’ouvrage de Mathias Gardet est à mi-chemin entre document d’archive et récit personnel. Il se compose d’éléments de la mémoire — notamment de dessins et d’extraits d’entretiens — de jeunes Algériens retenuEs dans un centre d’observation de la région parisienne, recueillis par l’institution elle-même au cours de ses démarches d’accueil et d’expertise, archivés méthodiquement par ses soins.
Discours composite
Ces bribes de témoignages sont restituées, chapitre après chapitre, par grands thèmes, et donnent lieu à la composition de discours à la première personne, d’une part d’unE jeune multiple et composite qui a/ont connu la rétention entre 1945 et 1963, d’autre part d’un avatar du chercheur lui-même...
Une profonde humanité
Cela permet à l’auteur de rendre compte de façon très vivante de la destinée de ces jeunes, issuEs de l’immigration algérienne, confrontéEs au racisme endémique de la France coloniale qui les assigne à une position sociale aux confins de la délinquance, de comprendre leurs parcours et le ressenti qu’iels ont de leur confrontation à l’administration française au cours des dernières années de la colonisation de l’Algérie.
L’« Index biographique des jeunes Algériens » fourni en annexe, est lui-même un document de première importance, qui restitue l’humanité profonde de ces jeunes, retenuEs souvent sans avoir commis aucun délit. Le délit de vagabondage, qui n’existe plus depuis 1935, leur est pourtant appliqué — plusieurs sont condamnéEs au « rappatriement » bien que nombre d’entre elleux soient de nationalité française !
Claude Moro