Publié le Mardi 20 février 2018 à 15h41.

Grève des sans-papiers face au projet de loi « asile et immigration »

Depuis lundi 12 février, 115 salariéEs sans-papiers se sont mis en grève illimitée pour exiger leur régularisation. Piquets de grève, assemblées générales, le dynamisme de cette nouvelle lutte pourrait bien faire tache d’huile.

Soutenue par la CGT et son secrétaire général, cette lutte implique des salariéEs, le plus souvent intérimaires, de plusieurs secteurs d’activité (collecte des ordures et des déchets, restauration rapide, BTP, logistique et distribution de colis), répartis sur plusieurs départements de l’Île-de-France. Elle exprime un ras-le-bol généralisé contre une situation intolérable que viendraient aggraver les dispositions de la loi « asile et immigration » si elle était adoptée. 

Une vie impossible pour les salariéEs

C’est dans ces termes que l’on peut résumer les dispositions contenues dans le projet de loi, notamment son article 16/2 qui envisage une peine pouvant aller jusqu’à 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende pour utilisation des papiers d’identité d’un tiers afin d’obtenir un emploi ! Or se faire embaucher « sous alias » est la seule façon d’espérer enclencher un processus de régularisation administrative pour les salariéEs étrangers. Les patrons en usent et en abusent, et c’est dans l’hypocrisie la plus totale que les donneurs d’ordre passent par des boîtes d’intérim peu scrupuleuses, y compris pour embaucher des salariéEs à peu de frais sur les grands chantiers de l’État. Certains grévistes ont plus de 10 ans d’intérim derrière eux, payent des cotisations sociales sans aucun retour, et les patrons refusent le plus souvent de leur fournir les documents administratifs leur permettant de régulariser leur situation.

Les militants associatifs et les syndicalistes le savent, les régularisations sont devenues plus difficiles, voire impossibles… Les consignes de fermeté données par Gérard Collomb (celui qui en a marre de « passer pour le facho de service ») ont pour effet de supprimer peu à peu les rendez-vous en préfecture et les accompagnements de bénévoles. Il faut désormais passer par hotline (le plus souvent saturée) et chaque demandeur doit fournir une adresse email personnalisée…Bienvenue au « pays des droits de l’homme » ! Pour toutes ces raisons, les grévistes et leurs syndicats n’entendent pas négocier avec les préfectures mais interpellent directement le ministère de l’intérieur. 

Le mouvement doit monter en puissance !

Les luttes des sans-papiers ont montré par le passé leur efficacité par la capacité à bloquer des secteurs d’activité entiers, entrainant des régularisations massives. Elles ne sont pas un élément isolé ou spécifique du combat général à mener contre le projet « asile immigration », mais un élément essentiel. Car les migrantEs arrivés récemment, fuyant les zones de guerre, déboutés de leurs demandes d’asile (dans environ trois cas sur quatre), comme les migrantEs pour des raisons économiques, deviendront rapidement, pour celles et ceux qui désirent rester ici, des sans-papiers.

L’hostilité au projet de loi « asile et immigration » gagne chaque jour du terrain. TravailleurEs sociaux, avocatEs, intellectuelEs, cinéastes se mobilisent pour faire échouer ce projet de loi raciste. Les collectifs de sans-papiers ont été parmi les premiers à prendre leurs responsabilités en appelant à la manifestation contre le racisme d’État du 17 mars. Le travail de mobilisation doit prendre de l’ampleur et les sections syndicales, unions locales doivent être sollicitées pour renforcer la mobilisation.

Pour le droit de circulation et d’installation, l’ouverture des frontières… Pour la régularisation de tous les sans-papiers ! Toutes et tous dans la rue le 17 mars !

Alain Pojolat