Publié le Jeudi 10 mars 2022 à 13h00.

Pour l’accueil de touTEs les réfugiéEs

En Ukraine, comme dans toute guerre, les populations civiles sont les premières victimes. Cette guerre déclenchée par l’État et l’armée russes contre l’Ukraine ne fait pas exception. Ils et elles étaient en début de semaine près d’un million et demi à avoir quitté le pays, des femmes, des enfants, des personnes âgées. Leur nombre augmente chaque jour.

Nous voyons les images de files de voitures ou de gens sautant dans les bus, ou marchant à pied avec une simple valise, contraints de tout abandonner. Poutine, dans un cynisme qui caractérise les tyrans, tout en bombardant la population, propose des couloirs pour que les réfugiéEs puissent s’enfuir, mais avec pour destinations obligées la Biélorussie ou la Russie. On sait quel sort leur sera réservé là-bas à l’arrivée ! C’est pourquoi les UkrainienEs refusent ces offres empoisonnées.

Accueil… et discriminations

La majorité des exiléEs se réfugient en priorité dans les pays limitrophes, la Pologne en particulier, mais aussi parfois dans d’autres pays plus éloignés. L’accueil par les habitantEs est en général généreux, chaleureux ; les manifestations de soutien au peuple ukrainien se multiplient tant l’invasion militaire de l’Ukraine par l’armée russe a choqué, indigné, ému, bouleversé le monde entier. En France comme ailleurs, spontanément des gens s’organisent pour aider, rassembler du matériel, de la nourriture, des vêtements, des médicaments et se proposent pour accueillir des réfugiéEs. Cet élan n’arrêtera pas Poutine mais il peut encourager celles et ceux qui résistent en Ukraine et les opposantEs en Russie en leur montrant qu’ils et elles ne sont pas seulEs.

Mais des discriminations ont été dénoncées, des réfugiéEs d’origine africaine ou arabe étant bloqués à la frontière ukrainienne ou non acceptés en Pologne. Il faut aussi remarquer que les préjugés racistes étant tenaces, ils frappent les journalistes comme une partie de la société. Certains évoquent ainsi l’émotion de voir des « Européens aux cheveux blonds et aux yeux bleus » se faire tuer (un officiel ukrainien sur la BBC), d’autres une « immigration de grande qualité, dont on pourra tirer profit » (le président de la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale sur Europe 1), ou encore une « ville relativement civilisée, relativement européenne » (un correspondant sur CBS).

Une solidarité à géométrie variable ?

Tous les représentants politiques (sauf l’irréductible raciste) sont tout à coup devenus favorables à l’accueil des réfugiéEs. Plus question de « protection contre des flux migratoires irréguliers », comme le déclarait Emmanuel Macron à propos des AfghanEs l’été dernier. Les frontières s’ouvrent pour les personnes qui fuient l’Ukraine. Et c’est tant mieux ! Des trains gratuits de la SNCF à l’activation possible de la directive de « protection temporaire » à l’échelle européenne deviennent possibles.

Mais c’est une solidarité à géométrie variable, dont ne bénéficient pas les migrantEs des autres pays. Et on peut rester dubitatif sur la réalité des politiques d’accueil qui vont suivre sur le long terme. Est-ce que de réels moyens vont être mis en place pour un accueil digne de ce nom ? Le directeur de l’Office français de l’immigration et de l’intégration vient d’affirmer que « les capacités d’accueil seront trouvées » pour les réfugiéEs ukrainiens. Très bien. Cela prouve donc que c’est possible et que l’argument de saturation des lieux d’hébergement sans cesse avancé n’est pas justifié.

Oui, il faut accueillir les réfugiéEs ukrainiens, dignement, et aussi accueillir pareillement touTEs les réfugiéEs, d’où qu’ils et elles viennent.