La carte bancaire sur laquelle l’allocation pour demandeurs d’asile (ADA) est versée chaque mois va devenir, alors qu’elle était un moyen de retrait d’argent liquide, une simple carte de paiement. Imaginez-vous du jour au lendemain privé de tout argent liquide. Pas le moindre euro ou centime, rien. C’est la décision brutale et dénuée de sens que l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) a prise cet été contre les demandeurEs d’asile.
Revenons sur ce qui existe à l’heure actuelle : unE demandeurE d’asile bénéficie d’une allocation de demande d’asile (ADA) qui est versée mensuellement sur une carte de retrait, car une grande partie des bénéficiaires ne disposent pas de compte bancaire pour pouvoir toucher l’ADA. Allouée uniquement pendant la procédure d’examen de la demande d’asile, l’ADA peut aller d’environ 7 euros par jour, soit quelque 200 euros par mois pour un célibataire, à plus de 400 euros pour un couple avec enfants. Avec la carte fournie par l’OFII, les demandeurEs d’asile peuvent retirer leur allocation chaque mois (en 5 fois maximum, après quoi il y a des frais de retrait qui s’appliquent).
25 paiements dans le moisAvec la décision prise par Didier Leschi, directeur de l’OFII, les demandeurEs d’asile ne pourront plus retirer cet argent dans les distributeurs. Et même si l’OFII vient d’annoncer, sous la pression de la pétition en cours, avoir décalé au 5 novembre, soit de deux mois, la mise en place de la réforme, le fond n’est en rien modifié. Plus d’espèces, c’est fini. La carte deviendra une simple carte de paiement, limitée à 25 paiements dans le mois. Chaque personne devrait donc aller faire ses courses, acheter sa baguette à 1 euro ou 1 kg de tomates en payant avec sa carte. Mais attention : pas plus de 25 achats dans le mois ! Et aucun argent liquide. Tant pis si le magasin ne prend pas la carte. Tant pis pour celles et ceux qui ne parlent pas français. Tant pis pour les courses à l’épicerie solidaire, qui ne prend pas la carte bleue. Tant pis pour les innombrables dysfonctionnements de l’OFII, qui « oublie » de verser l’allocation, qui la verse en retard, etc. Jusqu’à présent les personnes faisaient preuve de solidarité entre elles, l’une dépannant l’autre, et l’autre la remboursant le mois suivant. Désormais, il faudra la rembourser avec des achats CB de kilos de tomates ! À qui fait-on vivre une humiliation pareille ?
Cette mesure est une catastrophe pour les demandeurEs d’asile, une entrave à la libre disposition de l’allocation, qui limite les possibilités d’accès à un mode de vie normal le temps de l’instruction de la demande d’asile, mais pas seulement. Les hébergements d’urgence, les dépannages solidaires en alimentation, les associations de cours de français... demandent parfois des participations symboliques de 1, 2, 5 euros. Comment vont-ils faire ?Faudra-t-il que tout le monde s’équipe de terminaux de paiement électronique pour répondre aux fantasmagories de l’OFII, dont l’unique but est, une nouvelle fois, de durcir les conditions d’accueil et de vie des demandeurEs d’asile en France afin de les décourager ?
Correspondant
En ligne, la pétition lancée par la Ligue des droits de l’homme.