Deux ans et demi après le Grenelle de l’environnement, le Grenelle 2 doit donner un cadre législatif aux engagements pris. Il confirme que le gouvernement de Sarkozy est incapable de remédier à la profonde crise écologique. Jean-Louis Borloo, qui n’a pas peur de pontifier, nous invite à admirer le « monument législatif » qui sera laissé aux générations futures. Si une politique se mesurait au nombre d’articles de lois votés, ce gouvernement serait en effet champion. Pour autant, les mesures prévues sont totalement incapables de réduire massivement les différentes pollutions. Prenons deux exemples, les éoliennes et les pesticides.Il existe en France un lobbying contre le développement de la filière éolienne qui, à coups de rapports et de déclarations mensongères, s’est mobilisé tout au long du Grenelle pour réduire à néant les projets gouvernementaux. Si une des mesures controversées a finalement été retirée – l’obligation de produire au minimum 15 mégawatts1 pour un nouveau parc éolien –, d’autres dispositions vont mettre des bâtons dans les pales des éoliennes : l’interdiction de construire des parcs de moins de cinq machines, l’obligation de les assujettir aux autorisations ICPE (installations classées pour la protection de l’environnement) comme pour des sites industriels dangereux, l’interdiction de les implanter à moins de 500 mètres des habitations. Borloo, plein d’assurance et de courage politique, a d’ailleurs déclaré : « Sur l’éolien, je ne sais pas, à la vérité, quelle est la bonne solution. » Avec ces nouvelles obligations de concentration des éoliennes, c’est la possibilité de projets locaux, contrôlés par les populations, qui est gravement remise en cause.En 2007, Sarkozy disait « Nous ne voulons pas d’une agriculture qui épuise nos sols, d’une agriculture qui utilise de façon croissante des produits chimiques dangereux. » En 2010, changement de cap. Il s’agit plutôt de rassurer un électorat agricole qui serait menacé par les contraintes environnementales. Quelques jours avant le début de Grenelle 2, comme par hasard, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) a publié une analyse censée démontrer les dangers du projet de diviser par deux l’usage des pesticides en France d’ici dix ans. À cela s’ajoutent le maintien de l’autorisation de publicité pour les pesticides à usage domestique, la remise en cause de l’interdiction de pesticides dans les lieux publics (jardins, parcs, écoles) et des contraintes d’homologation pour les préparations naturelles du type purin d’ortie. Certaines ONG environnementales ont parlé de détricotage, validant l’idée que le processus initial était écologiquement ambitieux. Ainsi, Isabelle Autissier et Serge Orru, responsables de WWF France, évoquent encore l’audace et le courage de Nicolas Sarkozy en 2007. Outre la naïveté des analyses produites à ce moment-là et la participation peu critique au processus du Grenelle, le constat devrait aujourd’hui permettre de questionner la stratégie adoptée par de telles ONG. Acceptant les diktats gouvernementaux, en matière de nucléaire par exemple, s’engouffrant dans la brèche de la taxe carbone pour demander à ce qu’on élève son prix, n’organisant aucune mobilisation... elles s’étonnent de si piètres résultats. Face à ce gouvernement qui, confronté à la crise économique, ne peut même pas se permettre de verdir un tant soit peu son capitalisme, nous avons besoin de luttes massives, pour imposer une rupture avec le productivisme.Vincent Gay1. 2 620 éoliennes sont installées en France produisant 4 400 mégawatts (1,6 MW en moyenne par éolienne).
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