Publié le Vendredi 16 novembre 2018 à 16h10.

ONF : des marches qui ne se transforment pas en lutte… pour l’instant

De fin septembre au 25 octobre, l’intersyndicale nationale de l’ONF a organisé quatre « Marches pour la forêt » à travers tout le pays. Elles se sont rejointes aux abords de la forêt de Tronçais (Allier), forêt emblématique de chênes, le jour prévu d’une importante vente de bois finalement reportée par la direction.

Ces marches étaient ouvertes à tout le monde et surtout aux associations et militantEs écolo. Si la mobilisation de l’ensemble des collègues a été assez moyenne, la capacité d’organisation de l’intersyndicale, largement dominée par Solidaires, seul syndicat à avoir une assise militante importante, a été démontrée. Et le contact avec les milieux écolo a été bien établi. La stratégie de l’intersyndicale, qui s’affiche plus concentrée sur le sort et l’avenir des forêts que sur ceux du personnel et du service public, a de ce point de vue, fonctionné.

Une direction à l’offensive

Ces marches ont fait suite à un mouvement entamé à l’automne 2017, qui a vu s’unir 8 syndicats (représentatifs d’un émiettement statutaire et catégoriel hors normes…). Ceux-ci avaient bien pressenti les nouvelles attaques de la direction qui, avec Macron, se sent pousser des ailes, et qui se sont précisées et accélérées durant la Marche (le DG étant semble-t-il adepte de la provocation) : fin du recrutement de fonctionnaires, suppression de postes (3 % par an) qui pourraient représenter 1 500 pertes en 5 ans, exigence de 2 % de « rentabilité » en plus par an, mesures de mise au pas des cadres, demande de changement de statut de l’établissement couramment nommé « entreprise » par le DG, « réflexions » sur la fin de l’égalité de traitement entre les forêts communales… 

Après le coup de massue et l’écœurement provoqué par ces annonces, la mobilisation du 25 a été importante sans être à la hauteur de la « fin du métier de forestier» que risquent de représenter ces mesures d’ici moins de 5 ans. Environ 1 500 personnes étaient présentes au rassemblement, dont environ 500 des milieux écolo, et 1 000 ­collègues (sur 9 000, auxquels il faut ajouter de nombreux grévistes « à la maison » difficiles à estimer).

Une bagarre à construire

Comme durant la Marche, l’ordre du jour du rassemblement « citoyen » a été pensé pour favoriser la proximité avec les associations ou ONG de protection de l’environnement, en aboutissant à un « Manifeste de Tronçais » signé entre autres par la LPO, les Amis de la Terre, France nature environnement, Greenpeace... Assez juste à propos de l’importance de la forêt pour la société, le texte reste flou sur ce qui se passe à l’ONF et n’avance que la revendication d’un « grand débat public »...

Si l’axe « écologiste » est juste et pertinent, il ne devrait pas se faire au détriment du reste : la construction de la mobilisation sociale et la convergence avec les autres services publics, les suppressions de postes et la précarisation du personnel...

Et malheureusement, il faut bien constater que c’est le cas. À peine 1 h 30 de débat sur la journée consacré à la situation de l’ONF et les perspectives d’action, quasiment sans implication des directions syndicales. Résultat ahurissant après des semaines de marche et le regroupement d’un millier de collègues venus de tout le pays : on repart sans aucune suite pour la lutte, sans date ni action prévue ! Comme si on nous demandait de faire confiance au seul lobbying de la LPO et de Greenpeace pour nous sauver ? 

Les choses risquent d’aller assez vite. On a appris depuis que la fédération des communes forestières avait rencontré la « conseillère forêt » de l’Élysée (lobbyiste du vin issue d’une école de commerce...), pour des « réflexions » qui pourraient aboutir dans les 6 mois. Les nuages s’accumulent et la bagarre pour conserver le service public forestier n’est pas vraiment commencée.

Correspondant