Publié le Mardi 12 mai 2020 à 11h45.

Le travail c'est la santé ?

Retour sur une enquête publiée la semaine dernière par l'Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens de la CGT (Ugict-CGT)1.

Si de multiples enquêtes sur la situation dans les entreprises ont été menées par divers organismes de sondages, la CFDT, la CES, etc., la particularité de celle menée par l'Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens de la CGT (Ugict-CGT) est d'avoir été déployée largement avec 34 000 réponses (dont 25 000 réellement exploitables) et au travers de ce milieu spécifique constitué par ce que l'Ugict-CGT appelle « les salarié.es en responsabilité pour recueillir la vision de l’encadrement ».

Les réponses ont été fournies par une majorité de non syndiquéEs, ce qui se traduit par exemple par le fait que, sur l’ensemble des répondants, le taux de syndicalisation est de 49 %, alors que l’enquête CT-RPS (Dares-DGAFP-Drees-Insee) mesurait un taux de 11 % en 2016, et de 19 % dans la fonction publique. Cependant, selon l'Ugict-CGT, les correctifs apportés permet d'affirmer que « l’enquête peut être dite représentative sur les caractéristiques contrôlées. »

Le travail sur site

Le maintien du travail sur site concerne à plus de 60% les ouvrierEs/employéEs tandis que les cadres et professions intermédiaires sont à 70% en télétravail. Plus de 60% de ces salariéEs sont exposés au risque de transmission du coronavirus du fait des moyens de travail, du contact avec le public ou avec de nombreux et nombreuses collègues. Et même, pour plus d'un quart au contact de personnes vulnérables avec 13% de personnes elles-mêmes vulnérables. Pour 80% de salariéEs les moyens de protection (masques, gants, distanciation) étaient notoirement insuffisants.

Le télétravail

Pour près d'un quart des salariéEs, l'employeur n'a pris aucune mesure particulière. Plus d'un tiers n'ont pas reçu de matériel informatique ni bénéficié d'accompagnement par leur hiérarchie. Et dans la plupart des cas, aucune mise à disposition d'équipement. Plus grave encore, dans plus de 80% des cas le droit à la déconnexion, la définition de plages horaires précises n'ont été mis en place avec l'absence de réduction de temps et de charge de travail pour les parents d’enfants de moins de 16 ans. Pendant qu'un quart n’ont pas d’endroit ou s’isoler et un tiers, notamment les femmes, doit télétravailler tout en gardant les enfants.

Une situation qui, avec une augmentation du temps et de la charge de travail, génère d’importants risques psychosociaux : 35% des télétravailleurEs se plaignent d’une anxiété inhabituelle et près de la moitié de douleurs physiques.

La surexposition des femmes

Davantage exposées aux risques car occupant les métiers en contact avec le public, 36% des femmes ont subi une hausse de la charge de travail (contre 29% des hommes) alors que la fermeture des écoles s’est traduite pour 43% d’entre elles par plus de 4h de tâches domestiques supplémentaires. Le confinement a été facteur de tensions pour 20% des couples, et de violence pour 2% des répondantEs.

D'autres choix ?

De nombreux et nombreuses salariéEs (30%) considèrent que leur activité n'est pas essentielle et pour celles et ceux travaillant sur site 10% considèrent qu'elle aurait pu s'exercer en télétravail sachant que la plupart n'avait pas d'alternative aux transports en commun. Plus de la moitié de l'encadrement considère que la poursuite d’activité en présentiel constitue un risque de contamination des salariéEs et de la population, 30% qu'elle pourrait être limitée.

La politique des employeurs, encouragée par le gouvernement, consiste à favoriser la reprise du travail dans tous les secteurs au mépris des règles élémentaires de sécurité sanitaire et au risque d'aggravation des risques liés à l'organisation du travail. Les salariéEs ont déjà payé la crise : 55% des cadres ont ou vont perdre des jours de RTT, 57% des salariéEs en chômage partiel ont perdu des revenus, un tiers des salariéEs du privé considèrent que leur emploi est menacé. Le partage des sacrifices n'est envisagé qu'entre salariéEs en cherchant à diviser les salariéEs entre « cols blancs » favorisés et « cols bleus » désavantagés. Pour mieux exonérer patronat et gouvernement de toute responsabilité pour hier, aujourd'hui et de l'obligation de rendre des comptes. Dans la perspective de « changer tout ».