Mardi 3 septembre a débuté le Grenelle contre les violences conjugales, annoncé en juillet dernier par Marlène Schiappa. Il se déroule alors que plus de 100 femmes ont déjà été assassinées cette année par leur conjoint ou ex-conjoint.
À l’occasion du lancement du « Grenelle », Édouard Philippe a annoncé 10 mesures d’urgence contre les violences faites aux femmes, avec notamment la création de 1000 places d’hébergement d’urgence en plus des 5000 existantes, et une enveloppe de 5 millions d’euros s’ajoutant aux 79 millions déjà engagés.
Des moyens à la hauteur des besoins ?
Ces mesures sont largement insuffisantes face à l’urgence et la gravité de la situation. En effet, les estimations basses chiffrent à 220 000 les femmes victimes de violences chaque année et nous assistons à l’augmentation des féminicides (une femme meurt tous les deux jours sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint). Cela fait des années que les associations féministes proposent des solutions pour lutter contre ces violences et qu’elles réclament des moyens financiers à la hauteur des besoins, qu’elles estiment entre 500 millions et 1,1 milliard, bien loin du budget alloué ! La déclaration d’Édouard Philippe est un non-sens en elle-même : la création de 1000 places d’hébergement d’urgence coûtera déjà en soi bien plus de 5 millions d’euros ! Ces 1000 places (si elles voient effectivement le jour) seront, elles aussi, bien inférieures aux besoins réels qui, selon les associations d’aide aux femmes victimes de violences, s’élèvent à plus de 20 000. Nous devons exiger des moyens à la hauteur des besoins réels, tant en termes de place d’hébergement que d’accompagnement juridique, de financement des associations, d’embauche de travailleurEs sociaux, d’éducation et de formation etc.
Autre mesure annoncée par le gouvernement : un audit de 400 commissariats et gendarmeries pour y « détecter les dysfonctionnements » lors des dépôts de plaintes des femmes victimes de violences. On a un peu envie de dire que c’est le minimum, au vu des nombreux témoignages de femmes (comme en 2018 sous le hashtag #JeNaiPasPortePlainte) décrivant au mieux la désinvolture, au pire la moquerie ou la brutalité de la police.
Nous ne nous contenterons pas d’annonces
Le reste des annonces est du même acabit, avec des éléments administratifs peu utiles (retour d’expérience lors de féminicide, création d’une application de recherche de place en hébergement d’urgence) voire complètement contre-productifs comme la mise en place d’un « bracelet d’éloignement » que la victime et l’agresseur sont supposés porter tous deux et qui alerte directement la police si ce dernier se rapproche de trop près. Au-delà du fait qu’on voit difficilement comment cela pourrait se mettre en place, on se dit qu’on aurait aussi pu faire confiance aux femmes et les croire lorsqu’elles estimaient être en danger et appelaient les services d’urgences. D’ailleurs, effet de ce Grenelle, les appels au numéro d’urgence pour les femmes victimes de violences ont bondi, passant de 250 à près de 1400. Preuve que lorsque les campagnes de prévention sont menées les femmes savent s’en saisir pour demander de l’aide.
Nous ne nous contenterons pas d’annonces sans suites ni de mesures tiédasses d’un gouvernement prêt à tout pour se faire une image féministe sans débourser le moindre euro. C’est une véritable transformation de société qu’il nous faut, dans laquelle les violences faîtes aux femmes ne seront plus tolérés ou tolérables et où nous aurons les moyens de nous protéger dans tous les aspects de nos vies. Nous ne le dirons jamais assez : pour y arriver nous aurons besoin de construire toutes ensemble une mobilisation féministe de masse, unitaire et autonome contre les violences faites aux femmes.
Commission nationale d’intervention féministe