Après quatre ans d’investigations de la journaliste Virgine Vilar, la diffusion de l’émission « Envoyé spécial » jeudi 25 novembre a mené à un réveil de l’opinion publique et de la justice (ouverture d’une enquête préliminaire) concernant Nicolas Hulot. Combien de témoignages et d’années de silence et de souffrance auront été nécessaires ? Beaucoup trop.
Ces femmes dénoncent des faits, graves et répétés, d’agressions et de viols sur mineures et sur de très jeunes femmes, malheureusement aujourd’hui pour la plupart prescrits. Mais ce que révèle le reportage, c’est aussi que ces faits étaient connus autour de lui et qu’un écosystème s’était mis en place autour de ses pratiques.
Cela nous rappelle des témoignages sur l’entourage de DSK ou de Denis Baupin. Des bruits couraient, des gens savaient, son équipe « prévenait » les femmes de ne pas rester seules avec lui, de se méfier des endroits clos, etc. Soit une reconnaissance de ces attitudes de prédation classiques des agresseurs sexuels en série, dont on connait très bien la dangerosité mais dont on accompagne et organise l’impunité au nom de leur pouvoir politique.
Comme souvent, la réaction de l’intéressé a été la stratégie victimaire. Il a pris les devants en s’invitant sur BFM-TV le soir précédent la diffusion du reportage, s’est dit « écœuré » et « choqué » par les accusations. Hulot fustige un « tribunal médiatique » qui l’aurait déjà condamné, alors même que, comme le reportage le rappelle, des faits de même nature lui avaient déjà été reprochés lors d’un dépôt de plainte en 2008, affaire ressortie par le journal Ebdo en 2018 alors qu’Hulot était ministre. Tout cela sans suites… et même pire !
À cette époque, Hulot avait déjà été, au contraire, couvert et soutenu par le reste du gouvernement et le président lui-même. La ministre déléguée à l’Égalité femmes-homme Marlène Schiappa avait même été envoyée au front pour nous expliquer que Hulot était un homme de confiance, « sympathique ». La macronie a ainsi participé au renversement de culpabilité, classique, dont le but est de silencier les femmes : l’accusé devient la victime, les femmes mentent, sont suspectes, ne parlent pas comme il faut, trop, trop tard, pas assez…
C’est bien pour toutes ces raisons que le mouvement #MeToo est si puissant et indispensable au mouvement féministe. Aujourd’hui il s’élargit enfin un peu au champ politique, souvent le plus coercitif… Cette parole doit encore grossir, s’amplifier et pour cela il faut la soutenir et le dire, haut et fort, à toutes les victimes: « Oui, nous vous croyons ! »