Ce dimanche 24 juillet, l’opinion publique allemande a appris de nouvelles actions violentes, dans lesquelles des réfugiés récemment arrivés dans le pays étaient impliqués...
Alors qu’à Reutlingen, au sud-ouest du pays, un Syrien a attaqué une femme avec une machette (il n’y aurait aucun contexte idéologique, mais il s’agirait d’un « crime passionnel » selon le jargon de la police), une explosion a fait un mort – son auteur – et douze blessés. L’attentat, commis à Ansbach, en Bavière par un autre ressortissant syrien, était dirigé contre un festival de musique. Un lien avec le courant djihadiste et le prétendu « État islamique » ne serait « pas exclu ».
Il est trop tôt pour en mesurer les conséquences politiques à court et moyen terme. Jusqu’ici, le débat alimenté par des crimes précédents était tendu, mais n’avait pour le moment rien à voir avec l’hystérie politique actuellement mise en scène en France. À l’heure où Nicolas Sarkozy évoque une « guerre totale », François Fillon une « guerre mondiale » et où le député LR Georges Fenech propose « un Guantanamo à la française », le débat allemand semble jusque-ici presque marqué par la modération. Certes, au royaume des aveugles, le borgne fait figure de roi...
Trois jours après l’attentat meurtrier de Nice, l’Allemagne avait elle aussi connu une attaque horrible. Certes, il n’y a pas eu de dizaines de morts comme sur la Côte d’Azur, mais l’acte violent d’un adolescent de 17 ans de nationalité afghane, arrivé en Allemagne comme réfugié mineur isolé, a tout de même produit des images sanglantes. Brandissant une hache à bord d’un train régional à proximité de Würzburg (Bavière), il a blessé cinq personnes, dont quatre appartenant à une même famille chinoise en voyage.
Les réactionnaires à l’offensive
Les tenants d’un discours amalgamant délibérément « immigration » et « terrorisme » ne manquent pas en Allemagne. Ainsi l’hebdomadaire d’extrême droite Junge Freiheit (« Jeune Liberté », plutôt national-conservateur et intellectuel) a actuellement titré en Une sur « Cette terreur importée ». Un titre suggérant évidemment un lien entre les événements de Nice, de Würzburg et l’immigration.
Sur son blog, l’avocat et journaliste Nicolaus Fest durcit encore plus le ton. Fest a été pendant quelques mois, en 2013 et 2014, rédacteur en chef adjoint du journal tabloïd dominical Bild am Sonntag. Bien qu’il s’agisse d’un journal ancré à droite souvent qualifié de « populiste », Fest a quitté son poste en septembre 2014, après avoir publié deux mois plus tôt un article hostile aux musulmans « non intégrables à cause de leur culture ». Au sein de la puissance économique hégémonique en Europe, la maison de presse aux forts tirages veille aux équilibres politiques...
Et depuis, le discours public de Nicolaus Fest s’est encore radicalisé. Dans un récent article publié sur son blog, il prend prétexte de la tuerie de Nice ou de l’agression de Würzburg pour inciter à la haine contre les populations musulmanes. Il écrit ainsi : « L’islam n’est pas raisonnablement séparable de l’islamisme. (…) La terreur vient bien directement de l’islam. »
Mais de telles voix sont heureusement minoritaires à l’heure actuelle. La chancelière Angela Merkel a bien pris soin de déclarer, tout en condamnant évidemment l’attaque de Würzburg, à travers son porte-parole Steffen Seibert : « L’acte horrible d’un individu ne peut pas jeter le discrédit sur un grand groupe humain » (parlant des musulmanEs). Lundi 25 juillet, le ministre de l’Intérieur lui-même, Thomas de Maizière, un homme de droite, a déclaré : « Nous ne devons pas porter de soupçon généralisé contre les réfugiés, même s’il y a des procédures qui sont engagées dans des cas isolés. »
Il faut donc espérer que le climat général ne bascule pas à cause des nouveaux événements du week-end dernier.
Bertold du Ryon