Deux nouvelles récentes de l’Arabie saoudite – l’interdiction de construire des bonhommes de neige et la condamnation d’un blogueur dissident à 1 000 coups de fouet – viennent nous rappeler non seulement la nature obscurantiste et moyenâgeuse du régime, mais aussi l’énorme hypocrisie du gouvernement Hollande.
Côté ridicule, c’est Mohammed Saleh Al-Munadjid, apparemment un cheik très influent, qui, après les récentes chutes de neige dans le pays, a annoncé que Dieu aurait accordé aux gens « la liberté de construire tout ce qu’ils veulent à condition que ça ne contienne pas d’âme »... Donc pas de bonhomme de neige, de crainte, on suppose, que les gens ne se mettent à idolâtrer le petit bonhomme blanc.L’autre nouvelle, beaucoup plus sinistre, est celle de la condamnation du blogueur saoudien, Raef Badawi pour « insulte à l’islam », à 1 000 coups de fouet, une amende d’un million de riyals (230 000 euros), dix ans de prison et une interdiction de voyager pendant les dix années suivant l’incarcération... Animateur d’un site internet de débat, il a déjà reçu 50 coups de fouet sur la place publique et en recevra 50 chaque vendredi pendant encore 19 semaines, à moins que la campagne lancée par Amnesty International ne réussisse à empêcher cette folie.Raef Badawi a échappé de justesse à l’accusation d’apostasie (renoncement publique à sa foi), passable de la peine de mort, tout comme le sont le trafic de drogue et autres « crimes »... comme l’homosexualité, l’adultère ou la sorcellerie (!), avec exécution au sabre sur la place publique. Comment ne pas faire la comparaison entre les descriptions de la décapitation écœurante des otages de Daesh et l’absence d’informations dans nos médias ou de réaction de notre gouvernement sur les 83 décapitations publiques en Arabie saoudite en 2014 ? 83, un record depuis 5 ans... Il paraît que c’est « en gardant le contact », « par le dialogue » qu’on peut faire évoluer les régimes « autoritaires » !
Les droits de l’homme ou les contrats ?Parmi tous les grands « défenseurs de la liberté d’expression » que Hollande avait invité à manifester à Paris, se trouvait le ministre des Affaires étrangères de l’Arabie saoudite. Dans ce pays, la liberté d’expression est une chose assez simple. Pour la presse, cela n’existe pas, et internet est sévèrement censuré. Par contre pas besoin de censurer les films, il n’y a pas de cinémas, ni besoin de limiter l’expression des partis politiques, il n’y en a pas non plus. Quant aux religions, aucune autre que l’islam n’a le droit d’être pratiquée. Enfin, que dire de la situation des femmes saoudiennes dont le statut est celui de mineure, ou du million de travailleurs immigrés qui vivent dans des conditions proches de l’esclavage ?Les invités internationaux de Hollande étaient paraît-il là pour « lutter contre le terrorisme »... Pourtant, pendant des années, des groupes terroristes, comme al-Qaïda en Afghanistan ou Daesh à ses débuts, ont été financés par l’Arabie saoudite.Pour Hollande, Sarkozy et les autres, les droits de l’homme ne comptent pour rien quand il s’agit d’accès au pétrole et aux contrats très juteux pour « nos » capitalistes. L’Arabie saoudite est le premier partenaire de la France dans le Golfe, et son premier client dans le monde pour les armes. Et pour décrocher ces contrats, Hollande ne recule devant rien. Tout simplement révoltant.
Ross Harrold