Lundi 21 février, Starbucks Workers United a annoncé qu’il avait officiellement dépassé les 100 sites ayant déposé une demande de représentation syndicale, marquant ainsi une étape importante malgré le fait que l’entreprise intensifie ses efforts de lutte contre les syndicats. [Voir à propos des processus de syndicalisation de Starbucks et Amazon l’article publié sur le site d'Alencontre le 15 décembre 2021.]
«C’est officiel – nous avons atteint l’objectif des 100 établissements (cafés)», a tweeté le syndicat. «103 magasins (pour être exact) ont déposé des pétitions auprès du NLRB [National Labor Relations Board, agence du gouvernement chargée de conduire les élections syndicales et de contrôler les pratiques illégales] pour rejoindre le mouvement Starbucks Workers United!»
De nouvelles demandes dans trois cafés de Virginie et un du Wisconsin ont fait passer le nombre d’établissements à plus de 100, dans 26 Etats. Deux cafés ont réussi à se syndiquer jusqu’à présent, et des milliers de travailleurs sont en plaine campagnes d’organisation syndicale.
Selon le syndicat, le nombre de cafés ayant déposé une demande de syndicalisation a doublé au cours des trois dernières semaines; à la fin du mois de janvier, environ 50 cafés avaient déposé une demande de syndicalisation.
«Ne vous méprenez pas, nous sommes sur notre lancée», a déclaré Lynne Fox, présidente internationale de Workers United, dans un communiqué. «Je serais ravie d’avoir une conversation avec [le PDG de Starbucks] Kevin Johnson à tout moment. Les relations de travail doivent être fondées sur la collaboration et non sur l’affrontement. Il n’y a pas de succès sans la voix des salarié·e·s.»
L’entreprise s’est montrée de plus en plus hostile à l’égard du mouvement syndical, multipliant les gestes plus qu’excessifs à mesure que le mouvement syndical prend de l’ampleur. Au début du mois, l’entreprise a licencié sept travailleurs dans un café syndiqué de Memphis, dans le Tennessee. Les travailleurs et travailleuses licenciés faisaient tous partie du comité d’organisation du café.
Récemment, l’entreprise a licencié une organisatrice syndicale de premier plan à Buffalo, New York, où la campagne de syndicalisation a débuté. Cassie Fleischer, ancienne employée de Starbucks, était membre du comité du syndicat qui négocie actuellement avec l’entreprise les premiers contrats des cafés syndiqués de Buffalo.
«En tant que dirigeante des comités d’organisation et de négociation du syndicat, et ayant participé à l’organisation de la grève sur la sécurité face au Covid-19, je sais que quelque chose a changé», a écrit Cassie Fleischer sur Facebook. «Ce n’est pas l’entreprise pour laquelle j’ai signé en 2017, et cela prouve encore une fois que nous avons besoin d’un syndicat dans nos enseignes.»
Il est illégal pour une entreprise d’exercer des représailles contre des salarié·e·s qui exercent leur droit de former un syndicat. Cependant, les pratiques déloyales des employeurs peuvent prendre des années à être traitées par le National Labor Relations Board (NLRB). En outre, s’il est établi que l’entreprise a violé la loi en licenciant un employé syndiqué sans raison valable, il n’y a pratiquement aucune sanction pour cette dernière, qui serait seulement tenue de réembaucher l’employé et de payer les salaires pour le temps perdu – ou de s’acquitter du montant correspondant au «coût» normal de fonctionnement de l’entreprise si elle n’avait pas licencié l’employé.
La semaine dernière, Starbucks a également tenté de retarder le décompte des voix pour un café en voie de syndicalisation à Mesa, en Arizona, répétant son argument selon lequel les élections syndicales ne devraient pas être organisées café par café. Le NLRB s’est prononcé contre Starbucks, cette fois parce que l’entreprise a présenté trop tard ses prétentions dans le seul but de retarder le décompte des voix. Il s’agit en la matière d’une victoire étroite pour le syndicat, qui est convaincu que le café se syndiquera dans l’avenir. «C’est incroyablement décevant pour nous, mais nous savons qu’il ne s’agit que d’une victoire différée», a déclaré Michelle Hejduk, cheffe d’équipe au café de Mesa, lors d’une conférence de presse.
L’entreprise a déjà essayé d’argumenter contre les élections établissement par établissement dans ses tentatives de retarder ou d’arrêter les élections à Mesa et Buffalo, mais le NLRB s’est prononcé contre à chaque fois.
Ces tactiques s’ajoutent aux autres manœuvres antisyndicales menées par l’entreprise contre la syndicalisation. A Mesa, les salarié·e·s ont déclaré que Starbucks avait ajouté cinq directeurs et de nombreux employés dans le café lorsque leur campagne syndicale a commencé. Et les salarié·e·s de tout le pays ont rapporté que la firme organisait des réunions obligatoires et d’intimidation avec les salarié·e·s de chaque café qui se syndique afin de susciter la crainte et de les dissuader de se syndiquer.
Starbucks tente également d’influencer les négociations contractuelles à Buffalo dans les cafés où les salarié·e·s se syndiquent. [Starbucks se présente comme une société ne faisant qu’un et donc s’oppose à une syndicalisation et des négociations café par café.] La firme a donc dit aux employé·e·s qui se syndiquent d’attendre les résultats des négociations avant de voter pour un syndicat – tout en sachant probablement très bien qu’elle ferait traîner les négociations pendant des années si nécessaire.
Les employé·e·s, quant à eux, demandent à Starbucks de mettre fin à sa campagne antisyndicale et de revenir à ses racines en tant qu’entreprise prétendument progressiste.
Publié sur le site Truthout, le 22 février 2022 ; traduction rédaction A l’Encontre