La crise du Brexit se poursuit en Grande-Bretagne. Nous publions cette semaine le point de vue de Charlie Kimber, membre du Socialist Workers Party.
Theresa May doit être chassée après sa nouvelle défaite cinglante au Parlement mardi [12 mars]. La dernière version de l’accord sur le Brexit a été rejetée par 391 voix contre 241, soit la troisième plus large défaite jamais infligée à la Chambre des Communes.
« Les derniers sacrements du Parti conservateur »
La stratégie de May concernant le Brexit est en ruines. Un député conservateur haut placé a déclaré que « tout cela ressemble aux -derniers sacrements du Parti conservateur ». Il est désormais temps d’intensifier la lutte pour que ceci devienne une réalité.
May avait ramené au Parlement une version légèrement amendée de l’accord qui avait été rejeté par plus de 230 voix d’écart en janvier. Elle prétendait qu’elle avait obtenu suffisamment de concessions de l’Union européenne pour permettre au gouvernement britannique de décider quand il se retirerait du « backstop » irlandais. On parle ici du mécanisme par lequel l’Irlande du Nord serait maintenue dans l’union douanière européenne jusqu’à ce qu’un accord commercial global soit trouvé, entre la Grande-Bretagne et l’UE, après le Brexit. Il s’agit, par ce moyen, d’éviter que s’érige une frontière « dure » entre la Grande-Bretagne et l’Irlande à la fin de la période de transition du Brexit, en 2021.
Mais les espoirs de May ont été quasi instantanément torpillés par son propre ministre de la Justice, -Geoffrey Cox. Cox a en effet annoncé, après avoir examiné les nouveaux éléments de l’accord, que la Grande-Bretagne ne pouvait toujours pas se retirer du backstop sans l’accord de l’UE. Presque immédiatement, les fanatiques du DUP [Parti unioniste démocrate, protestants nord--irlandais] et le European Research Group (ERG), réunissant des parlementaires conservateurs favorables au Brexit, sous la houlette de Jacob Rees-Mogg, déclaraient qu’ils ne soutiendraient pas l’accord de May.
Un petit groupe de conservateurs, qui avaient voté contre l’accord en janvier, on voté pour ce nouvel -accord, car ils craignaient que le Brexit soit complètement enterré. Mais ils ont été loin d’être assez nombreux pour faire la différence. Commentaire de l’éditorialiste politique de la BBC Nick Robinson : « C’est terminé. L’accord, et peut-être le gouvernement May. Le DUP et l’ERG y ont veillé. Ce qui est extraordinaire, c’est que personne ne sait ce qui va se passer ensuite. »
Vers de nouvelles élections générales ?
La seule bonne réponse est qu’il devrait y avoir de nouvelles élections générales. Avant le vote, même Charles Walker, député conservateur bien connu, déclarait que « si l’accord n’est pas adopté ce [mardi] soir, il faudra qu’il y ait des élections générales ».
Il s’agit d’une crise de toute la classe politique, et de la façon dont elle fait de la politique. Paniqué, le Financial Times explique que « la priorité doit désormais être d’éviter le chaos : le chaos au Parlement, qui serait exploité par les extrémistes de gauche et de droite, et le chaos d’une sortie sans accord ».
C’est au mouvement ouvrier, et non aux députés, de déterminer l’issue de la crise. Ce gouvernement pourri, profondément raciste et antisocial, n’a plus de mandat pour continuer à exercer. Il est aujourd’hui le prisonnier d’une douzaine de fanatiques et d’une fraction du Parti conservateur qui ne se préoccupent aucunement de la vie des gens ordinaires. […]
May n’obtiendra aucune concession supplémentaire de la part de l’UE. Le vice-président de la Commission européenne Jyrki Katainen a déclaré que si l’accord était rejeté, la perspective d’un « hard Brexit » se rapprochait et que son conseil était : « Attachez vos ceintures. »
Theresa May a peut-être une dernière carte à jouer. Si la sortie sans accord est rejetée cette semaine [elle a été rejetée depuis la rédaction de l’article], alors le seul Brexit qui pourrait advenir serait une version incorporant encore davantage de règlements de l’UE. […] Dans ces circonstances, May pourrait proposer un nouveau vote sur son accord, et les Jacob Rees-Mogg et consorts pourraient se rabattre sur un soutien à May. Mais si telle est sa stratégie, il s’agit bien d’un pari désespéré et risqué.
Les Travaillistes ont a juste titre voté contre l’accord. Mais ils n’offrent aucune alternative de lutte alors que le gouvernement est en pleine zone de turbulences.
Il y a un grand vide à combler, et les directions syndicales et travailliste devraient mobiliser la population autour d’un programme complètement différent de celui des Conservateurs. Et s’ils n’encouragent pas des millions de personnes à entrer en action, alors ce sont les militants qui doivent essayer de combler ce fossé.
Charlie Kimber (traduction J.S.)