Mercredi dernier, sur le campus de l'université de Denver dans le Colorado, a eu lieu le premier débat entre les deux candidats à la Maison blanche, débat suivi par près de 70 millions d’Américains. Le milliardaire républicain et mormon, Mitt Romney, est donné gagnant, aux points, de ce premier round face à un Obama qui a joué le match en dedans, comme désarmé face à son propre bilan et deux ans de cohabitation avec les républicains majoritaires au Congrès depuis 2010…
« Le président a une vision très similaire à celle qu'il avait quand il s'est présenté il y a quatre ans, celle d'un gouvernement plus important, avec plus de dépenses, plus d'impôts, plus de régulations. […]Continuer avec le statu quo ne fait pas l’affaire des Américains aujourd’hui », a attaqué le très réactionnaire Romney posant à l'homme du changement pour flatter le mécontentement suscité par le bilan d'Obama et vendre sa camelote ultra-libérale. Sans conviction, conciliateur, Obama a défendu un bilan impopulaire sans autre perspective à proposer que sa volonté de continuer le job. Difficile d'être offensif, de porter « l'espoir et le changement » comme en 2008 alors que le chômage n'a cessé d'augmenter depuis – plus de 27 millions d'Américains n'ont pas d'emploi –, que le pouvoir d'achat recule, que les inégalités s'aggravent et que l'économie stagne. Ce qui devait être la grande réforme d'Obama, l'assurance maladie, laisse 20 millions de personnes sans aucune protection alors que des millions d'autres doivent acheter des contrats d'assurance auprès des grandes compagnies auxquelles Obama a laissé le monopole du marché. La dette américaine a augmenté de 6 000 milliards de dollars durant son mandat pour alimenter une politique de relance qui n'a profité qu'aux banques, au patronat et aux plus riches.
Romney, dont le ticket avec Paul Ryan, proche des Tea Party, a la sympathie acquise de l'électorat le plus réactionnaire, a essayé de mettre un peu d'eau dans sa soupe libérale en affirmant qu'il ne baisserait pas les impôts pour les grandes fortunes, qu’il ne remettrait pas en cause la sécurité sociale (système de retraites) et les programmes d’assurance maladie pour les plus de 65 ans (Medicare) et les plus pauvres (Medicaid). Il lui faut tenter de gagner une partie de l'électorat d'Obama pour espérer avoir une chance de l'emporter. Mais cela ne l'a pas empêché de redire sa volonté d'abroger la réforme santé promulguée en 2010 pourtant bien limitée et injuste. Il a joué au défenseur des classes dites moyennes, pour l'essentiel les salariés qui ont du travail et dont le salaire a stagné voire reculé. Le millionnaire apôtre dévoué de la libre entreprise et de l'initiative privée, de la réussite individuelle s'est voulu proche du peuple… Cela ne l'empêche pas de traiter « d'assistés », de « victimes » les électeurs d'Obama…
Ce baratin creux et vide ne tient que par le bilan des démocrates et leur politique tout aussi libérale même si son emballage se revendique d'une idéologie progressiste. Alors, Obama, le moindre mal ? En fait un moindre mal dont la politique ressemble à celle du mal avec lequel Obama cherche un arrangement. Sur le fond, les deux candidats affichent les mêmes objectifs, lutter contre la dette publique, les déficits par l’austérité et maintenir la domination américaine. Tous les deux sont candidats des 1 %. « Nous avons à imaginer comment notre camp peut s'organiser pour affronter l'austérité et l'oppression qui continuera ici, qu'importe qui gagnera en novembre » écrivent nos camarades de Socialist Worker.
Yvan Lemaitre