Publié le Dimanche 13 juillet 2014 à 08h06.

État espagnol : Podemos, un espoir parcourt l’Europe

Après des années de mobilisations essentiellement défensives, puis la marée d’indignation portée par le mouvement du 15M des IndignéEs, Podemos a surgi comme une force politique nouvelle avec cinq élus au Parlement européen. Mais comme tout nouveau mouvement, Podemos n’est pas à l’abri de certains débats, difficultés et défis.

Une des caractéristiques des périodes de reflux est que la gauche tente d’intégrer dans ses propres structures plutôt que d’aller vers les structures que « génèrent » les gens. C’est en partie compréhensible. S’il n’y a pas de mouvement, il n’y a pas de lieu où aller, ce qui entraîne repli et isolement. Les tentatives pour subsister en période de reflux ou de crise du mouvement entraînent souvent des tendances bureaucratiques, car sans la pression d’en bas, ce sont les institutions dominantes qui font pression d’en haut. C’est ainsi que les organisations traditionnelles de la gauche ont eu tendance à se transformer en appareils conservateurs en raison de la pression générée par les liens avec les appareils de l’État et les dynamiques basées uniquement sur la lutte électorale.

Mettre le « faire » avant l’« être » pour « renaître »Lorsque le mouvement populaire fait de nouveau irruption, toutes ces routines sont remises en cause. Podemos tire sa force précisément du fait qu’il n’impose pas de formes organisationnelles, mais reprend celles qui ont été expérimentées dans les AG, ouvrant des espaces de participation collectifs. À Podemos, on parle plutôt d’auto-organisation opposée au modèle des organisations politiques de la gauche traditionnelle où la relation entre militant et structure est prédéfinie.Ce grand avantage n’est pas exempt de difficultés, comme la nécessité de donner forme à des structures propres, capables d’agir de manière pratique, de s’adapter aux rythmes imposés par la vie quotidienne. Le défi consiste à parvenir à adapter la participation à la vie et non la vie à la participation. Dans Podemos, nous nous trouvons, de facto, en présence de deux processus parallèles qui n’interagissent pas. L’un, venu d’en bas, expérimental, créatif, ouvert, et l’autre, venu d’en haut, fermé, beaucoup plus rapide au moment d’agir, qui envoie des décisions à l’ensemble de Podemos. Il est nécessaire d’équilibrer progressivement cette relation entre le « haut » et le « bas », sans perdre de vue ce qui bouge dans les marges, par des mécanismes de contrôle et de décision qui irriguent tout l’espace de Podemos. La nouvelle période qui s’ouvre, dans laquelle Podemos sera lié aux institutions (et à leurs « récompenses » matérielles), est également un cadre connu pour un processus accéléré de bureaucratisation, s’il n’y a pas un fort contrôle de la base sur le sommet. Il ne s’agit pas de liquider la capacité de décision des cercles exécutifs, mais de créer la possibilité de les élire et de les contrôler par des assemblées, avec des principes de rotation et de révocabilité, en cherchant un équilibre entre l’autonomie des cercles et l’ensemble du projet. Le discours de Podemos a beaucoup insisté sur la participation et le contrôle démocratique pour modifier la logique de la représentation. Restent à créer les conditions pour sa concrétisation.Podemos doit faire la démonstration de sa crédibilité. Son défi le plus grand est de donner confiance dans un monde plein de doute, où tout a échoué et où il ne reste rien de très crédible. La responsabilité est peut-être excessive pour une force aussi jeune, mais elle est réelle. Espérons que cette expérience, avec toutes ses contradictions, servira d’exemple dans d’autres régions d’Europe menacées par les fantômes de l’autoritarisme et que surgissent 1, 10, 1000 Podemos

De Madrid, Brais Fernández

Version longue ; http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article32375