À quelques jours d’intervalle, Donald Trump a annoncé, d’une part, son intention de se présenter à nouveau lors de l’élection présidentielle de 2020 et, d’autre part, qu’il avait ordonné des bombardements sur l’Iran… avant de revenir sur sa décision.
«Nous étions prêts et engagés à riposter la nuit dernière sur trois sites différents quand j’ai demandé combien de personnes allaient mourir. 150, Monsieur, m’a répondu un général. 10 minutes avant la frappe, je l’ai stoppée » : c’est, une fois de plus, par un tweet, que Donald Trump a informé le monde, le 21 juin, qu’il avait annulé des frappes sur l’Iran. Des bombardements qui auraient été une « réponse » à la destruction par l’Iran, la veille, d’un drone US qui effectuait, selon Téhéran, un vol au sein de l’espace aérien iranien.
Des menaces bien réelles
Celui qui se posait lors de son élection en champion du « non-interventionnisme » était donc, semble-t-il, prêt à lancer ses avions contre l’Iran. Qu’il s’agisse ou non de déclarations destinées à montrer les muscles, il y a de quoi être inquiet face à cette escalade de l’administration Trump contre l’Iran, un an après le retrait des États-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien. A fortiori dans un contexte de guerre froide régionale entre Iran et Arabie saoudite : depuis plusieurs années, les deux puissances interviennent militairement hors de leurs frontières pour préserver ou étendre leurs zones d’influence, s’affrontent par groupes satellites interposés, et chaque pays de la région, voire chaque force politique, est sommé de choisir son camp.
Nous avons déjà eu l’occasion de l’écrire dans nos colonnes : il est difficile de déterminer en quoi consiste la « stratégie internationale » de Trump qui, comme dans bien d’autres domaines, est avant tout un adepte du coup de gueule, du coup d’éclat et du coup de poing sur la table. Les ultraconservateurs de son entourage poussent à une intervention contre l’Iran, qui pour l’instant se manifeste principalement par des sanctions économiques et, comme le rappelle Mediapart1, « un programme de cyberattaques et d’opérations clandestines contre des installations militaires et des groupes liés au renseignement iranien ». Une guerre de basse intensité, mais une guerre bien réelle, qui confirme que les menaces militaires s’inscrivent dans un contexte belliciste assumé, avec le risque accru de voir un Trump, désormais en campagne, soucieux de montrer qu’il n’est pas un « parleur » et qu’il peut mettre ses menaces à exécution.
La guerre chaude à l’ordre du jour ?
Trump semble souffler le chaud et le froid, tiraillé entre, d’une part, ses conseillers et son électorat conservateurs et islamophobes et, d’autre part, ses promesses « non-interventionnistes ». Mais force est de constater que celui qui, il y a quelques années encore, accusait Obama de vouloir « attaquer l’Iran pour sauver la face », n’a guère rompu avec la politique impérialiste des États-Unis : « Il a ordonné par deux fois des frappes en Syrie et soutient activement l’intervention saoudienne au Yémen, tandis que les États-Unis restent engagés dans sept guerres (Afghanistan, Irak, Syrie, Yémen, Somalie, Libye, Niger). » 2
Le 24 juin, Trump, dans son style inimitable, annonçait que « les actifs de l’ayatollah Khomeini et de son équipe ne seront pas épargnés par les sanctions ». Un président des États-Unis visiblement mal renseigné, puisque l’ayatollah Khomeini est mort en… 1989, et que l’actuel « Guide suprême » est l’ayatollah Ali Khamenei. Une confusion qui pourrait prêter à sourire si la situation n’était pas aussi grave et si les risques de guerre chaude n’étaient pas de l’ordre du fantasme. L’urgence demeure, aux États-Unis comme dans l’ensemble des pays impérialistes, au premier rang desquels la France, à la constitution de fronts anti-guerre, contre les expéditions militaires et les ventes d’armes, qui menacent chaque jour un peu plus l’avenir, déjà sombre, des peuples du monde.
Julien Salingue