Publié le Lundi 24 mars 2025 à 18h00.

États-Unis : Quelle est la distance qui nous sépare du fascisme ?

Quelle est la distance qui nous sépare du fascisme ?

La question largement débattue aujourd’hui en Amérique parmi la moitié du pays qui a voté pour les démocrates ou qui se considère comme progressiste, et parmi celles et ceux qui se situent à l’extrême gauche, est la suivante : « Donald Trump a-t-il créé un régime autoritaire en l’espace de quelques mois ? Et à quel point sommes-nous proches du fascisme ? »

Tous les journaux télévisés et radiophoniques, toute la presse écrite traditionnelle et les médias sociaux débattent de cette question. Les preuves s’accumulent pour répondre à la question : Trump a instauré un régime autoritaire et nous nous dirigeons vers le fascisme. Qu’est-ce qui vient étayer l’idée que la démocratie traditionnelle et la séparation des trois pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire) sont en péril grave ?

Vers une dictature techno-politique ?

Trump et les Républicains contrôlent la présidence et les deux chambres du Congrès et le président a nommé une grande partie de la Cour suprême de droite qui a donné au président l’immunité contre les poursuites pour les actes officiels commis pendant qu’il était en fonction. Le Congrès a de fait cédé son pouvoir. Aucun des Républicains du Congrès susceptibles d’être en désaccord avec Trump n’a voulu lui tenir tête, de peur qu’il ne détruise leur carrière politique. Le Parti démocrate national, dont la direction est divisée, n’a élaboré aucun plan de résistance au Congrès ou devant les tribunaux.

Trump a créé le Department of Government Efficiency (DOGE), qui n’est pas un véritable service gouvernemental, et a nommé le milliardaire Elon Musk à sa tête. Musk a fermé des agences créées par le Congrès, mis fin à des programmes gouvernementaux de protection sociale et licencié des dizaines de milliers d’employéEs fédéraux. Trump et Musk affirment qu’ils éliminent la fraude, le gaspillage et les abus, bien qu’ils n’aient jusqu’à présent présenté aucune preuve à l’appui de cette affirmation. Certes, le peuple américain a élu Trump et donné aux Républicains une majorité au Congrès, mais le travail de Musk est clairement un coup d’État, une prise de contrôle inconstitutionnelle et illégale du gouvernement.

Trump s’arroge également le droit d’annuler des dépenses votées par le Congrès, ce qui constitue une violation de la Constitution, qui stipule qu’il doit exécuter fidèlement la loi.

Trump défie la justice

À ce jour, 132 actions en justice ont été intentées contre l’administration Trump pour ses actions illégales, et dans plusieurs d’entre elles, les tribunaux ont émis des injonctions arrêtant temporairement Trump et Musk et les obligeant même à rouvrir des agences ou à réembaucher des travailleurs licenciés. Trump a demandé — et c’est inédit — la destitution de ceux qu’il appelle les « juges fédéraux voyous », c’est-à-dire les juges qui prennent des mesures qui le bloquent. Le président de la Cour suprême, John Roberts, a réprimandé Trump en déclarant que la destitution n’était pas une réponse appropriée à un différend concernant une décision judiciaire. Dans certains de ces cas, Trump et son équipe semblent être sur le point de résister aux ordres des tribunaux, ce qui engendrerait une crise constitutionnelle et marquerait clairement la fin des normes gouvernementales démocratiques.

Il musèle les libertés

Dans le même temps, Trump, Musk et les législateurs républicains, ainsi que les influenceurs des médias de droite, appellent à la destitution des juges fédéraux et publient en ligne des informations personnelles les concernant, telles que leur adresse personnelle. Des juges et leurs familles ont reçu des menaces de mort et beaucoup vivent désormais dans la peur.

Trump s’en prend également aux universités, menaçant d’expulsion les étudiantEs activistEs néEs à l’étranger, comme Mahmoud Khalil, étudiant à Columbia, supprimant ainsi la liberté académique et la liberté d’expression.

Il veut aussi faire taire les médias. Dans un discours prononcé au ministère de la Justice, il a déclaré : « Je pense que CNN et MSNBC, qui écrivent littéralement 97,6 % de mauvaises choses à mon sujet, sont des bras politiques du parti démocrate et, à mon avis, ils sont vraiment corrompus et illégaux. Ce qu’ils font est illégal ». Trump a fermé le média international du gouvernement, Voice of America, et a également interdit à l’Associated Press (AP) d’assister aux conférences de presse, parce qu’elle a refusé de changer le nom du Golfe du Mexique en Golfe de l’Amérique. Nous vivons désormais dans un régime autoritaire, et le fascisme semble se profiler à l’horizon.

Dan La Botz, traduction Henri Wilno