Lors des trois premières vagues de l’épidémie de Covid-19, la situation à la Martinique était relativement stable. En 16 mois, de mars 2020 à juillet 2021, 129 personnes sont décédées de cette infection, dont une écrasante majorité de personnes âgées. Mais brutalement, à partir du début du mois d’août 2021 la situation s’est dégradée avec le variant Delta.
Plus de 300 personnes ont perdu la vie pour le seul mois d’août (pour 376 000 habitantEs au total), soit une dizaine de personnes par jour. Des personnes de tous âges, de toutes conditions sociales, des familles perdant en quelques jours ou heures plusieurs de leurs membres. Les urgences, la morgue, les fossoyeurs : tous débordés. Les services de réanimation ont été obligés de laisser mourir certainEs patientEs faute de places, des pénuries d’oxygène, certains soignantEs parlant de scènes de guerre… En ce début du mois de septembre, d’après les données de la préfecture, si le nombre de contaminations diminue, celui des hospitalisations, des patientEs en soins critiques, et des morts, continue d’augmenter.
Comment expliquer la crise ?
Lorsque les médias français ont commencé à s’intéresser à la situation, certains bien-pensants se sont empressés d’affirmer avec mépris que ces populations préfèrent pratiquer le vaudou ou se soigner au rhum plutôt que d’accepter la science venue de la « métropole » (Dr Hervé Boissin, généraliste, sur LCI le 31 juillet). On a ainsi parlé de magie, d’ignorance et de superstition d’une population pas moins instruite qu’en France.
Difficile de tirer un bilan au moment où l’épidémie fait rage encore, mais plusieurs facteurs peuvent être évoqués. À commencer par un constat : les populations des colonies françaises, dont celle de la Martinique, manifestent une grande méfiance à l’égard des vaccins anti-covid, comme cela a été le cas en France au début ; même si la vaccination progresse depuis quelques jours, le taux reste faible.
Une défiance sur les questions sanitaires qui s’explique également par le scandale du chlordécone, minimisé par Macron, qui a fait l’objet d’une importante manifestation le 27 février lorsque l’on a appris que le crime allait être prescrit.
Les incohérences au plus haut niveau de l’État ont suscité l’hostilité et la méfiance ; ainsi, en février 2020, ce sont des manifestantEs qui ont interdit le débarquement de touristes italiens à la Martinique au moment où l’épidémie était forte dans leur pays.
L’autoritarisme et la disproportion des mesures prises lors du premier confinement, avec l’instauration d’un véritable climat de terreur alors que la situation n’était pas aussi dramatique qu’en France, l’absence de concertation avec les autorités locales ont créé du ressentiment contre de Paris.
Le dédain à l’égard de la pharmacopée locale engendre une attitude de défense qui consiste à s’opposer à la chimie imposée par l’État.
L’ennui est que la mobilisation contre les mesures du gouvernement ont, comme en France, mêlé refus du pass et refus des vaccins.
Lutter contre le pass… et pour la vaccination
C’est dans ce contexte que déferle une avalanche de fake news prises au sérieux par des gens intellectuels ou pas, diplômés ou pas, certains médecins, enseignants… Ainsi, ce climat antivax n’épargne aucun syndicat, dont les dirigeants préfèrent évoquer la liberté de choix, et ce malgré le décès de deux éminents d’entre eux, relativement jeunes… et non vaccinés.
Quelques organisations politiques telles que le PCM, le PPM, et nos camarades du GRS ont pris position pour la vaccination. Depuis peu, des personnalités du monde médical, culturel et associatif, ont clairement pris position pour le vaccin.
CertainEs syndicalistes mènent bataille pour que le combat contre le pass et pour la vaccination non obligatoire soit pris en charge par tout le mouvement syndical, et pas seulement sur les problèmes de santé mais sur toutes les urgences sociales.
Nos camarades du GRS prennent toute leur place dans ce combat, pour que tout soit mis en œuvre afin d’inciter la population à se faire vacciner, seul moyen dont nous disposons actuellement pour arrêter l’épidémie.
Aujourd’hui il semble que se dessine un consensus des organisations syndicales et associatives telles l’Union des femmes de la Martinique et Culture égalité, contre le pass et l’obligation vaccinale, et pour une prise en charge efficace de la santé de la population.