Publié le Vendredi 13 septembre 2024 à 17h00.

Gabon, nouveau pouvoir et anciennes recettes

Le coup d’État, s’il met fin aux outrances du pouvoir précédent, ne représente nullement une rupture avec la politique suivie depuis des décennies.

Il y a un an, le chef de la garde républicaine Brice Oligui Nguema renversait Ali Bongo et mettait fin à 56 années de règne de la dynastie familiale en se proclamant président de la transition.

Prendre le pouvoir

Ce coup de force a été bien accueilli par la population. Contrairement à son père Omar, Ali Bongo n’a pas entretenu les réseaux clientélistes qui permettaient d’assurer une base sociale à son pouvoir. Il s’est au contraire isolé réservant sa confiance à un petit groupe nommé la « young team » composé de trentenaires aussi incompétents que cupides.

Le nouveau maître du Gabon sous la pression de la communauté internationale a accepté de réduire la période de transition de trois à deux ans. Un dialogue national inclusif a été mis en place, il sera suivi d’un référendum en décembre 2024 pour adopter une nouvelle Constitution, puis de l’élection présidentielle prévue l’année prochaine.

L’exercer

Nguema s’est attaché à rassurer les milieux d’affaires gabonais en octroyant notamment une réduction des prix de l’essence de 27 % aux entreprises. Il a maintenu également la base militaire française dans la capitale Libreville et signé des contrats d’une valeur d’un milliard d’euros sous l’égide du Medef. Bon élève aussi des institutions financières internationales, il concentre les efforts budgétaires pour le remboursement d’une dette qui ne cesse de s’aggraver. En 2024, elle représentait 73 % du PIB avec une prévision de 78 % pour l’année prochaine.

Même quand l’homme fort du pays entend mener une politique souverainiste, cela devient une aubaine pour les multinationales. Ainsi la nationalisation de l’entreprise pétrolière Assala Energy a coûté 1,3 milliard d’euros alors qu’elle était valorisée à 730 millions d’euros. Cet investissement qui a nécessité un emprunt et augmente l’endettement du pays, aurait mieux servi à financer une diversification de l’économie du pays. De plus la gouvernance de cette entreprise par le pouvoir suscite des inquiétudes au vu du scandale de la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG).

Et le garder

La SEEG a été l’objet de fraudes massives occasionnant des pertes financières colossales. Des personnalités influentes et proches de Nguema sont impliquées dans cette affaire. Cela ne l’empêche nullement de préparer la présidentielle en soignant sa popularité, même s’il ne s’est pas officiellement déclaré candidat. 

Une élection qu’il devrait remporter facilement car tous les membres des institutions de la transition, à l’exception du président, ne peuvent participer au scrutin. Parmi ces derniers, on compte beaucoup d’opposantEs qu’ils soient politiques ou issuEs de la société civile.

Nguema renoue avec les méthodes politiques d’Omar Bongo. Il construit son réseau en y intégrant les principales élites, y compris celles qui s’étaient opposées au régime du fils Bongo incapable de suivre l’exemple de son père.

Paul Martial