Ce qui s’est passé il y a une semaine au Parlement pourrait bien constituer, sous une forme différente, le vote d’un quatrième mémorandum. Peut-être plus insupportable que les trois premiers, pour ce qu’il révèle des complicités entre la Troïka et la grande bourgeoisie grecque.
En effet, sous le chantage d’un risque de blocage des 11 milliards de prêts de la Troïka, le gouvernement de Samaras a fait adopter à la hussarde un incroyable paquet de lois attaquant ce qui tenait encore un peu debout dans l’économie grecque.Ainsi les médicaments pourront être vendus en dehors des pharmacies (dans les grandes chaînes de supermarchés), ce qui est une menace directe contre la profession (grosse mobilisation). Le pain pourrait être désormais vendu dans des magasins sans rapport avec la boulangerie. La date de fraîcheur du lait pasteurisé passera de 5 à 7 jours : derrière cette décision qui a mis dans la rue des milliers de producteurs agricoles, on retrouve les grandes chaînes commerciales, ainsi que les industries laitières souhaitant importer le lait de l’Europe de l’ouest, en le présentant désormais comme « lait frais ». La mort annoncée pour les petits producteurs. Il y a aussi la baisse du prix de rachat de l’énergie photovoltaïque produite par les particuliers, ce qui les menace de faillite, vu les emprunts souvent effectués pour s’équiper ; une manif de centaines d’entre eux a été réprimée aux gaz chimiques. Avec le transfert des enseignants des écoles privées du ministère de l’Éducation à celui du Travail, on répond à la demande des petits et gros propriétaires de ce secteur lucratif de surexploiter davantage encore leurs personnels. Il y a enfin l’autorisation de revendre des banques au privé à des prix ridicules par rapport à ce que l’État a déjà payé pour acquérir des actions pour les renflouer... On pourrait citer d’autres mesures, contre les employés du privé, sur l’ouverture des magasins le dimanche, la baisse des cotisations patronales dans les caisses de sécurité sociale…
Front de luttesLe projet de loi contenait 800 pages… et avait été remis aux députés la veille du vote, ce qui montre en quelle estime sont tenues les procédures démocratiques ! La gauche a dénoncé ce que Tsipras a qualifié de « coup d’état parlementaire », et Syriza a tenté une procédure de défiance contre le ministre de l’Économie Stournaras, qui aurait pu aboutir... si le dirigeant du Pasok, le réactionnaire Venizélos, n’était pas intervenu !Mais l’essentiel était ailleurs... Dans la rue, un véritable front s’était créé, à l’appel des secteurs concernés appuyés par les syndicats et la gauche, et le dimanche 30 mars, plusieurs milliers de personnes ont manifesté devant le Parlement. Mardi 1er avril, alors que pour protéger la tenue de l’Eurogroup, le gouvernement avait interdit les manifestations grâce à des décrets datant de la junte, 20 000 personnes se sont retrouvées dans la rue, les différents cortèges se retrouvant près du Parlement où les policiers ont lancé leurs charges brutales.C’est bien cette combativité qui est l’élément le plus marquant de ces quelques jours qui se terminent pour le gouvernement par une victoire étriquée, avec une crise dans le Pasok et aussi pour la droite. Baltakos, numéro 2 du gouvernement, vient d’être démasqué comme étant en relation suivie avec les nazis de Aube dorée.Alors oui, il est grand temps que cette clique soit chassée, mais ce doit être avant tout par la poursuite des mobilisations, ne serait-ce que pour empêcher les nouvelles exigences de la Troïka !
D’Athènes, A. Sartzekis