Publié le Jeudi 9 février 2017 à 13h19.

Italie : Nouveau gouvernement, vieux problèmes

Le résultat du référendum du 4 décembre dernier, le rejet du projet de loi du gouvernement et du patronat qui prévoyait de modifier la Constitution dans un sens antidémocratique et autoritaire, était le reflet du mécontentement d’une majorité de la population.

Ce mécontentement visait les politiques d’austérité et de limitation des droits poursuivies ces dernières années par les différents gouvernements, dont le dernier fut dirigé par Matteo Renzi qui a démissionné après la défaite. Une satisfaction de courte durée, car en fait, il a réapparu comme secrétaire du parti assurant la majorité au nouveau gouvernement qui est un copié-collé du précédent, dirigé cette fois-ci par Gentiloni, son fidèle lieutenant. L’ex-chef du gouvernement apparaît aujourd’hui en difficulté : la Cour constitutionnelle a rejeté une partie de sa loi électorale, et dans le Parti démocrate (PD), il y a des tensions et des gros mots volent, parmi lesquels « scission ». Une recomposition est en cours dans les élites politiques, que ce soit à droite ou à « gauche ».

Une opposition à construire...

Dans une tentative de prendre sa revanche, Renzi voudrait des élections politiques anticipées, tout comme le Mouvement 5 étoiles et la Ligue du Nord de Salvini qui espèrent obtenir des succès dans les urnes. Mais d’autres secteurs politiques (parmi lesquels une partie du PD) s’y opposent, tandis que la bourgeoisie ne souhaite pas de nouveaux incidents de parcours, préférant s’en tenir au gouvernement actuel jusqu’à la fin de la législature (2018) pour affronter la difficile situation économique.

Le vote référendaire exigeait quelque chose de plus, à condition qu’il y ait une opposition réelle, solide, qui dépasse le cri dépité d’électeurs qui individuellement introduisent un bulletin de vote dans l’urne, se contentant de la « démocratie moderne » électronique des « cela me plaît » et des « oui » ou « non » des petits plébiscites à la Beppe Grillo, dont le mouvement vit actuellement une période difficile. Puisque cette opposition n’existe pas et que sa construction semble être un objectif difficile et lointain, le jeu politique retourne dans les mains du bloc bourgeois dominant qui a appuyé jusqu’au bout les choix « à la dure » de Renzi.

En fait, très peu a changé. Bien au contraire, car ce fut sans difficulté (mais ici il s’agissait de sauver les banques...) que le nouveau gouvernement a trouvé 20 milliards d’euros, contrairement aux « non » (le déficit budgétaire ne le permettrait pas) que l’on nous oppose toujours quand il s’agit de renouveler les contrats des fonctionnaires ou de refinancer les services publics. Pour les banques au bord de la faillite (ou déjà en faillite), c’est un problème qui concerne le rapport entre la finance et les entreprises. Dans la liste noire des grands débiteurs défaillants qui ont fait tomber la banque Monte Paschi di Siena, en l’amenant à cumuler 47 milliards d’emprunts toxiques, il y a du beau linge de la société italienne.

Dans le même temps le gouvernement est en train de mettre en œuvre une contre-réforme de l’école publique. Il a aussi conclu un accord avec l’Europe et un des gouvernements libyens pour des opérations honteuses dans les eaux méditerranéennes afin d’empêcher les migrants africains de rejoindre l’Italie. Tout autre chose que le droit d’asile pour celles et ceux qui fuient la guerre et la famine !

Pour combattre les reculs

Les dernières données statistiques officielles indiquent la persistance d’une situation difficile, avec l’augmentation de la pauvreté absolue et relative, la baisse des revenus, la diminution de l’espérance de vie (surtout dans les classes populaires) et une augmentation générale du chômage. Le chômage des jeunes augmente pour atteindre les 40 %, pendant que les personnes âgées de plus de 60 ans continuent à rester au travail, empêchées de partir à cause des contre-réformes sur les retraites.

La réforme récente du code du travail a rendu les conditions du travail encore plus précaires. Mais cela doit rester comme ça, selon la décision de la Cour constitutionnelle qui a déclaré que le référendum, qui envisageait la suppression des règles concernant le licenciement des salariés, était irrecevable... malgré les trois millions de signatures recueillies par la Cgil.

La décision de la Cour constitutionnelle tient compte des directives qui émanent du gouvernement européen : supprimer les mesures de protection des travailleurs et libérer le marché du travail des « droits ». Au même moment, les directions syndicales sont en train de signer avec les patrons des contrats nationaux de branche qui rendent aux entreprises une grande partie des droits sur les salaires et les conditions de travail qui avaient été gagnés lors des luttes des années 1960-1970.

Tout cela se passe malgré des oppositions significatives qui se sont manifestées dans des secteurs importants, mais malheureusement minoritaires, de travailleurs et travailleuses combatives. La question centrale reste la capacité du mouvement ouvrier de reprendre l’initiative et de redevenir un ­protagoniste social et politique.

De Rome, Diego Giachetti

(Traduit par Ross Harrold)