Publié le Jeudi 28 mars 2013 à 12h12.

Obama en Israël : rien de neuf sous le soleil impérial

Le 20 mars, Air Force One se posait à Tel Aviv, pour une visite d'Obama en Israël et dans les territoires palestiniens. Alors que certains attendaient des « gestes » de la part du Président des États-Unis, sa tournée proche-orientale n'a débouché sur rien de concret, sinon un soutien à peine dissimulé à Israël. Quand l'arbitre entraîne l'une des deux équipesDepuis le début des années 90 et du soi-disant « processus de paix », les États-Unis aiment se présenter comme arbitre du conflit opposant Israël aux Palestiniens. Or si la super­puissance étatsunienne a bien contraint Israël, il y a plus de 20 ans, à entrer dans un « processus négocié » avec les Palestiniens, les exigences vis-à-vis des uns et des autres n'ont jamais été de la même nature, ce qu'a confirmé la visite d'Obama. « Alliance indestructible » : tel était le nom de la visite présidentielle en Israël. Poignée de mains chaleureuse avec Benyamin Netanyahou, qui venait de nommer un gouvernement marqué par la présence inédite des colons et de l'extrême droite, conférence de presse à Jérusalem, dont le statut de capitale n'est pourtant reconnu par aucun État, visite sur la tombe de Theodor Herzl, père fondateur du sionisme… Obama a accumulé les gestes indiquant le soutien des États-Unis à son allié israélien. Aucune critique de la politique d'Israël n'a été formulée, Obama réaffirmant même le caractère « éternel » de l'alliance entre les deux pays. Surprenant ? Pour quiconque n'a pas été illusionné par le discours du Caire en 2009, au cours duquel Obama, malgré un changement de ton par rapport à Bush, n'avait rien annoncé, le non-événement que représente sa visite au Proche-Orient n'est qu'une confirmation. A-t-on oublié que, dès de sa première campagne, Obama déclarait qu'il reconnaissait la « sacro-sainte sécurité d’Israël » et qu'il lutterait « toujours pour soutenir le droit d’Israël à se défendre à l’ONU et dans le monde entier » ? A-t-on également oublié qu'en décembre 2012, quelques semaines après l'offensive meurtrière contre Gaza, les États-Unis ­s'engageaient à fournir pour près de 650 millions de dollars d'armes à Israël, en premier lieu des bombes et des missiles permettant de reconstituer le stock israélien et de préparer les prochains bombardements ? L'Autorité palestinienne : l'indispensable caution ?En acceptant de recevoir pendant quelques heures Obama à Ramallah, Mahmoud Abbas a apporté l'indispensable caution palestinienne à un président des États-Unis qui a pourtant refusé de se rendre à Gaza et qui ne s'est pas privé d'adresser, lors de la conférence de presse commune, des reproches aux Palestiniens, les enjoignant de renoncer à la violence et d'accepter de « négocier » avec Israël sans avoir aucune exigence, y compris au sujet de la colonisation continue des territoires palestiniens. En résumé : c'est aux Palestiniens, qui n'ont plus rien, de donner encore un peu plus. Dans une région bouleversée par les processus révolutionnaires en cours depuis plus de deux ans, il est hors de question pour l'impérialisme étatsunien de prendre le moindre risque. Malgré un rapprochement notable avec les Frères musulmans égyptiens, l'administration états­unienne considère toujours Israël comme son allié le plus fiable, et ceux qui prévoyaient des pressions sur Israël en sont pour leurs frais. Le soi-disant « processus de paix », quand bien même il rime avec spoliation, colonisation et répression, maintient une stabilité relative au Proche-Orient, principalement en raison de l'existence de l'Autorité palestinienne, appareil d’État palestinien chargé de redistribuer les aides internationales aux Palestiniens et de les réprimer en cas de velléités contestataires. Il n'est guère surprenant que quelques jours après la visite d'Obama, l’État d'Israël ait décidé de se remettre à verser à l'Autorité palestinienne les taxes et droits de douane qu'il lui doit, afin de pouvoir permettre à l'appareil d’État de fonctionner et de rémunérer ses employés, notamment les forces de police. La direction de l'AP n'a, une fois de plus, rien obtenu de concret pour les Palestiniens. Elle a été humiliée par un président des États-Unis qui renvoie Abbas et les siens à leur place au sein du dispositif impérial aux Proche-Orient : un supplétif de l'armée d'occupation. Pour nombre de Palestiniens qui n'ont pas hésité à manifester contre Obama, il s'agit de changer de logiciel : la solution ne viendra pas d'une soumission aux impérialismes, mais d'une reconstruction du rapport de forces contre Israël, passant par une rupture avec le Processus d'Oslo et par une reconfiguration des alliances, en phase avec les processus révolutionnaires en cours. Julien Salingue