Publié le Mercredi 12 février 2025 à 11h00.

OppriméEs et exploitéEs du monde entier, solidarité !

Les images post-cessez-le-feu qui nous parviennent montrent le contraste entre le retour à la vie « normale » après la fin des bombardements et l’horreur des destructions à Gaza. Respectant cette partie de l’accord, l’armée d’occupation s’est retirée du corridor Netzarim qui coupait la bande en deux.

Ce corridor est celui des tirs de snipers et des assassinats sans sommation. Les images sont celles du retour dans un décor lunaire de désolation et de destruction. Mais celles d’un retour quand même. 

Renverser les normes internationales

Dans ce contexte, Trump a renouvelé plusieurs fois son souhait de « nettoyer » Gaza. Expulser les GazaouiEs pour les expédier dans d’autres pays. L’appel de Trump à un nettoyage ethnique de Gaza est l’affirmation d’un mouvement mondial, avec Israël à l’avant-garde, qui cherche à renverser les normes inter­nationales établies de longue date. Les liens des PalestinienNEs avec cette terre s’opposent directement à ce projet.

Dans la logique décrite, Gaza n’est plus qu’un lotissement en bord de mer, prêt à être acquis et investi. En prenant exemple sur la «Riviera » de la Côte d’Azur comme argument de vente. Trump a évoqué le potentiel de rendre à Gaza sa grandeur — mais sans les GazaouiEs.

Plan incohérent

Dans la conférence de presse qu’il a tenue avec Netanyahou, il a aligné les propos incohérents et contradictoires sur son « plan ». D’un côté, les PalestinienNEs pourraient revenir, de l’autre ils auraient des « maisons tellement belles qu’ils ne voudraient plus partir ». Il a insisté sur le contrôle américain sur la bande de Gaza. Il a évoqué vouloir convaincre l’Égypte ou la Jordanie pour déporter les PalestinienNEs. Et payer la reconstruction avec l’argent saoudien. En revanche, pas question de délivrer des visas pour venir aux États-Unis

La plupart des journaux main­stream ont adopté le langage de Trump lorsqu’il s’agit de la Palestine. Le New York Times a parlé de « réinstallation » des PalestinienNEs comme si le déplacement forcé et le nettoyage ethnique étaient un casse-tête logistique plutôt qu’un crime contre l’humanité. Sur France Info, un journaliste explique : « On a envie de voir si cette proposition de Trump a vocation à exister sur le plan économique […] La bande de Gaza en Riviera, est-ce que ça a du sens pour le professionnel du tourisme que vous êtes ? La bande de Gaza a des atouts, on l’a déjà dit… »

Déshumanisation à son comble

Nulle part il n’a été fait mention du nettoyage ethnique ou de la reconnaissance de ceux qui cherchent à chasser la population indigène. La déshumanisation est à son comble. Même si la couverture médiatique peut être critique sur les plans de Trump, ce n’est pas la moralité de l’acte qui est mise en doute, mais plutôt sa faisabilité. L’accent porte essentiellement sur les défis pratiques d’un tel projet : les obstacles logistiques, les hésitations des gouvernements arabes, le risque d’instabilité régionale et le sérieux de Trump. 

Par exemple, dans The Economist, on évalue son plan « époustouflant » comme un « levier » destiné à faciliter la normalisation avec l’Arabie saoudite et à donner à ce pays une justification pour normaliser ses relations après 15 mois de massacres et de destructions à Gaza. Nulle part pour indiquer que déporter des gens est un crime, d’autant plus grand qu’il s’agit d’un peuple victime de génocide. Nulle part pour même se demander ce qu’en penseraient les personnes concernées à qui on n’a pas demandé leur avis.

Un vieux rêve fasciste

Trump a plusieurs fois insisté sur le fait qu’il allait convaincre l’Égypte et la Jordanie d’« accueillir les GazaouiEs » qui auront des maisons « merveilleuses » car l’Arabie saoudite a « énormément d’argent »

Il s’agit d’une continuation du génocide et d’une purification ethnique et raciste. En déportant en masse aux USA et en le proposant en Palestine, Trump donne corps à un vieux rêve raciste et fasciste de sociétés avec des populations subalternes. Il s’agit d’un projet pour les PalestinienNEs mais également pour tous les oppriméEs et les exploitéEs du monde entier. Les PalestinienNEs sont chez eux — ils resteront chez eux. 

Édouard Soulier