Toute une série de forces parapubliques/privées opèrent en Ukraine. Depuis les forces tchétchènes de Ramzan Kadyrov (les Kadyrovtsy, qui sont officiellement placées sous le commandement de la Garde nationale russe) jusqu’à diverses forces privées, dont les mercenaires de Wagner dirigées par Evgueni Prigojine : les « succès » de ses troupes à Bakhmout ont été (et restent) glorifiés par Poutine.
Ces forces « irrégulières » ont été légalisées de fait en novembre 20221, lorsque Poutine a signé la modification des règles de défense. Auparavant, l’article 13 de la Constitution de la Fédération de Russie interdisait explicitement « la création et les activités d’associations publiques dont les objectifs et les actions visent à créer des formations armées ».
Instruments du pouvoir…
L’article 71 stipule également que « les questions de défense et de sécurité, de guerre et de paix, de politique étrangère et de relations internationales sont la prérogative de l’État et que les entreprises privées ne peuvent donc pas être impliquées. Le code pénal définit également l’activité mercenaire comme un crime, y compris le “recrutement, le financement ou tout autre soutien matériel d’un mercenaire” », ainsi que l’utilisation ou la participation de mercenaires dans un conflit armé.
Des amendements ont donc été mis en œuvre par l’ordonnance du ministre de la Défense Shoïgu le 15 février. Elle « définit la procédure de fourniture d’armes, d’équipements militaires et de logistique aux formations volontaires, ainsi que les conditions de service ». Les médias russes ont également fait état de l’ouverture de centres de recrutement Wagner dans 42 villes du pays (notamment dans les prisons russes).
La rivalité entre les différentes forces armées servait en partie les intérêts de Poutine. Mais, elle nuit à l’efficacité du pays au combat, car la fragmentation des forces rend le commandement et le contrôle difficiles. La résistance ukrainienne a révélé cette fragilité.
…ou/et lui échappant ?
Aussi, au cours des dernières semaines, le ministère de la Défense — donc avec le soutien de Poutine — a annoncé qu’il allait placer le groupe Wagner et d’autres forces et milices sous son contrôle direct. En avril, le gouverneur adjoint de Novossibirsk a annoncé que les employéEs des sociétés militaires privées pourraient utiliser le certificat de réinsertion délivré aux vétérans de l’armée nationale de la guerre en Ukraine pour accéder à une série de services.
Cette annonce a été perçue comme une indication du besoin désespéré de force de frappe de la Russie et du désir du Kremlin d’éviter une mobilisation à grande échelle de la population. Et là, c’est la peur de révoltes sociales qui motive Poutine. La période de conscription actuelle, qui s’est ouverte le 1er avril et se termine le 15 juillet, a pour objectif déclaré de recruter 147 000 soldats.
Mais Prigojine a refusé catégoriquement de signer un contrat — alors que le groupe Akhmat des forces tchétchènes a été l’un des premiers à s’engager. Et après avoir attribué au commandement de l’armée et du ministère de la Défense la responsabilité des échecs — contre la résistance ukrainienne — il a dénoncé les mensonges de cette guerre. Qu’a-t-il « monnayé » avec son vieil ami l’autocrate président du Bélarus ? On ne le sait pas encore. Pas plus qu’on ne sait qui sera le premier « défenestré »… mais il s’agit d’une « fenêtre d’opportunité » pour la résistance ukrainienne.
- 1. Les informations ci-après sont tirées de l’article de Tracey German pour The Conversation : https://www.socialeurope…