« Présider la République, c’est ne pas inviter de dictateurs en grand appareil à Paris ». Telles sont les fortes paroles prononcées par le candidat Hollande au Bourget le 22 janvier 2012. Lauréat du Grand prix de l’entubage, il a invité les 6 et 7 décembre, à Paris précisément, une quarantaine de chefs d’État africains à participer à un sommet intitulé « Paix et Sécurité en Afrique »…
Parmi eux se trouvaient Idriss Déby qui, arrivé au pouvoir au Tchad il y a 23 ans, y règne par la terreur et aurait depuis longtemps dû céder la place sans le soutien constant de l’armée française (face, notamment, aux rébellions qui, en 2005-2006, manquent de peu de le chasser). Étaient aussi là le Congolais Denis Sassou Nguessou, figure emblématique de la corruption à grande échelle des dirigeants africains, en place de 1979 à 1992 et, à l’issue d’une guerre civile, à nouveau sans interruption depuis 1997… Sans oublier Faure Gnassingbé et Ali Bongo, à qui un coup d’État dans le cas du président togolais et la fraude électorale pour l’actuel président gabonais, ont permis de succéder à leurs pères qui avaient régné respectivement 40 et 42 ans. Et enfin Blaise Compaoré, solidement installé depuis le meurtre de son compagnon Thomas Sankara, il y a 26 ans.
Une indécence qui atteint les sommets !On pourrait sans peine allonger la liste. L’important est que, en les recevant sur le perron de l’Élysée, François Hollande ne se contente pas de se déjuger une fois de plus. Il témoigne avec éclat de la continuité de la Françafrique sur ses trois piliers : politique (soutien sans faille aux dictateurs amis), économique (prédation organisée des ressources de l’Afrique) et militaire (avec l’éternelle justification coloniale des bonnes causes que l’on prétend défendre).De tout cela, un tribunal citoyen a largement rendu compte, le 4 décembre avec l’audition de nombreux témoins. Une belle manifestation a été organisée le lendemain à l’initiative de l’association Survie. De nombreuses organisations africaines et françaises, dont le NPA, y ont appelé.Car le seul infléchissement perceptible depuis quelques années, c’est la pose de la feuille de vigne que représente la caution recherchée et obtenue sans peine des Nations unies et de l’Union européenne. Il est clair que, en Afrique comme ailleurs, le changement, ce n’est pas maintenant pour celui qui a conclu son allocution d’ouverture en déclarant : « Aujourd’hui, c’est Nelson Mandela qui préside les travaux de ce sommet »… atteignant ainsi un sommet d’impudence !
François Brun