Publié le Mercredi 25 juillet 2018 à 15h00.

Sommet Trump-Poutine : les dangereux compères

Difficile de savoir ce dont Trump et Poutine ont discuté lors de leur rencontre le 16 juillet à Helsinki. Syrie, Corée du Nord, nucléaire… étaient au menu. Mais aussi l’épineux dossier de l’ingérence russe dans la présidentielle US de 2016. Avec un Trump particulièrement vaseux à propos d’une affaire qui le poursuit comme son ombre.

Trois jours avant le sommet Trump-Poutine, 12 agents du renseignement russe étaient inculpés par le procureur US en charge de l’enquête sur l’ingérence russe, accusés d’avoir piraté, durant la campagne présidentielle de 2016, des ordinateurs du Parti démocrate. Un épisode supplémentaire dans une affaire qui n’en finit plus de rebondir, entre soupçons d’ingérence massive de la Russie dans la campagne, dénégations de Trump, limogeages dans les services de renseignement US et démissions en cascade dans l’entourage du président des États-Unis. 

Un roman d’espionnage

Selon les enquêteurs US, le Kremlin aurait, au cours de l’année 2016, mené une campagne de piratage et de désinformation contre Hillary Clinton, candidate démocrate à la Maison-Blanche, dans le but de favoriser une victoire de Trump, jugé plus conciliant à l’égard des intérêts russes. Les révélations succèdent aux révélations, et des proches de Trump sont mis en cause, avec dernièrement Carter Page, conseiller pour la politique étrangère de Trump pendant sa campagne, accusé d’avoir été « l’objet d’un recrutement ciblé par le gouvernement russe », selon un document de la Foreign Intelligence Surveillance Court, service de contre-espionnage US. 

Difficile de s’y retrouver dans ce qui ressemble de plus en plus à un roman de John Le Carré, entre manœuvres politiciennes, rivalités entre services, barbouzeries diverses et espionnage avéré. Une chose est toutefois certaine : les éléments probants s’accumulent et le moins que l’on puisse dire est que la défense de Trump, qui n’est pas (encore ?) lui-même accusé d’avoir directement coopéré avec le pouvoir russe, ne convainc pas grand monde. 

Une nouvelle Trumperie

Dernier exemple en date lors de sa rencontre avec Poutine, à la suite de laquelle il a été questionné par un journaliste d’Associated Press auquel il a fait une réponse… surprenante : 

– Journaliste : « Le président Poutine a nié toute interférence dans l’élection de 2016. Chaque agence américaine de renseignement a conclu que la Russie en était responsable. Qui croyez-vous ? » 

– Donald Trump : « Le président Poutine dit que ce n’est pas la Russie. Je ne vois pas pourquoi ça le serait ».

Une séquence qui a déclenché un véritable tollé aux États-Unis, où le président US a été accusé – entre autres – de « trahison », le forçant à un rétropédalage en règle : Trump a ainsi expliqué qu’il s’était mal exprimé et avait oublié… une particule négative. Il prétend désormais avoir voulu dire : « Je ne vois aucune raison pour laquelle cela NE serait PAS la Russie. » 

Doit-on rire ou grincer des dents ? Difficile à dire. Mais nul doute que cette nouvelle Trumperie en dit long sur la personnalité du président de la première puissance économique et militaire mondiale, un dangereux et incontrôlable énergumène, capable d’affirmer tout et son contraire, et qui a en outre de plus en plus de mal à dissimuler son admiration pour un Poutine symbole du nationalisme, du -virilisme et de la violence en politique. 

Julien Salingue

Lire dans l’Anticapitaliste mensuel n°99 (juillet 2018) notre dossier consacré au nouvel ordre impérialiste mondial.