1 000 manifestantEs à Lyon, 400 à Paris, 300 à Toulouse ou 200 à Strasbourg, et de multiples rassemblements dans différentes villes : la journée du 20 janvier a été une bonne surprise. Quelques milliers d’étudiantEs sont sortis dans la rue pour dénoncer et protester contre la situation qu’ils subissent depuis bientôt un an. Un milieu militant étudiant, mais aussi de nouvelles têtes, et des formes d’organisation sur les réseaux sociaux.
Au-delà des chiffres encore faibles, des noyaux étudiants s’organisent, malgré les contraintes, dans des sit-in, blocages de partiels, des AG et des discussions numériques. À Lyon, ce sont notamment les étudiantEs de Lyon III, fac historiquement de droite, qui se sont fait remarquer et se sont organisés via un groupe Facebook au titre clair : Génération Covid. Bref, les « derniers confinés » commencent aussi à se montrer.
« Politiques incompétentes, jeunesse agonisante »
Solitude, précarité et enfermement dans des logements exigus et parfois insalubres, les étudiantEs voient leurs conditions de vie et d’études s’aggraver depuis le début de la pandémie. Beaucoup décrochent, ne trouvent pas de stages, cherchent des boulots qui se raréfient. L’isolement, notamment causé par la fermeture des facs, se fait terriblement sentir, allant parfois jusqu’aux suicides qui ont fait l’actualité. Dans les AG et sur les réseaux sociaux, de nombreux témoignages insistent sur le caractère insupportable du confinement tel qu’il est imposé aux jeunes. Alors qu’un troisième confinement est évoqué par la presse, la réouverture des universités a été mise en avant. Les étudiantEs demandent, pour que cela puisse se faire dans les meilleures conditions, plus de moyens : embauches de personnels et de profs ; réquisition de locaux. Et derrière les problématiques universitaires, la situation des étudiantEs expose l’impossibilité d’avoir accès à un revenu ou un logement correct pour l’essentiel des jeunes.
Les prises de parole dénonciatrices et les manifestations sont l’expression d’une colère face au mépris du gouvernement, et à l’avenir que nous réserve la société qui nous dit « Travaille et tais-toi ! ». Ce qu’on nous demande d’accepter, ce sont les licenciements massifs qui vont des salariéEs en CDI aux jeunes payés au noir, la quasi-disparition des liens sociaux, la restriction de nos libertés symbolisées par la loi sécurité globale et la répression policière, à l’image de l’intervention des flics interpellant des étudiantEs de Paris IV le 7 janvier.
Des prémisses de mobilisations plus massives ?
Protégé par la police interpellant et nassant des étudiantEs à l’intérieur du campus de Saclay, Macron a quand même été obligé de se positionner jeudi 21 janvier sur la situation des étudiantEs en annonçant la mise en place d’un chèque psy (dont on ignore d’ailleurs le montant). À ce chèque s’ajouterait la possibilité d’avoir accès à deux repas par jour pour un euro dans les restaurants universitaires (dont beaucoup sont fermés) et une reprise des cours seulement un jour par semaine (sans donner de moyens concrets pour le permettre). Au pire, des effets d’annonce, au mieux des miettes, alors que la pauvreté qui touche les jeunes avait déjà suscité colère et indignation en novembre 2019, lorsqu’un jeune étudiant lyonnais s’était immolé. Quant aux promesses de Macron cet été concernant le soutien aux jeunes entrant sur le marché du travail, la vague de licenciements déjà engagée annonce la couleur : l’avenir qu’ils nous préparent, c’est celui du chômage. Les queues auprès des associations d’aide alimentaire toujours plus longues, les colis distribués par les universités insuffisants sont les symptômes d’une indifférence totale de la part du gouvernement à l’égard des étudiantEs pauvres. Les jeunes n’ont pas à ramasser les miettes alors que des centaines de milliards sont distribués aux grandes entreprises !
Les manifestations et rassemblements sont une belle occasion de briser l’isolement social mais aussi et surtout de pouvoir discuter entre nous de comment construire la suite, et de comment changer cette société, prête à laisser crever de faim des millions de personnes au chômage. Malgré les contraintes sanitaires, des manifestations, mêmes modestes, seront organisées dans les jours et les semaines à venir. Virtuelles ou pas, des AG sont tentées, et c’est dans cette direction qu’il faudra continuer pour se faire entendre.
Le 26 janvier au matin, 350 étudiantEs avec des pancartes improvisées manifestaient à Nantes, plusieurs centaines se rassemblaient à Toulouse, et des cortèges de jeunesse s’organisaient pour les manifestations de l’après-midi au côté des profs du primaire et secondaire. Et si c’était parti pour durer et s’étendre en débouchant sur un affrontement avec le pouvoir ?