Publié le Jeudi 16 février 2012 à 19h43.

C’est la rue qui tue, pas le froid

Cinq sans-abri (ou plus ?) sont morts ces derniers jours de grand froid. Et comme chaque année, médias et ministres se mobilisent, « oubliant » ce que rappelle Christophe Louis, de l’association Morts de la rue1 : « La situation est la même que durant le reste de l’année, et la même que chaque hiver. En 2011, près de 390 personnes sont mortes dans la rue. Depuis janvier, nous sommes déjà à 45 décès. On meurt toute l’année prématurément lorsque l’on vit à la rue, pas seulement en hiver. On ne meurt pas de faim, mais de violences, d’incendies quand le réchaud prend feu dans la tente, de maladies non soignées. »

L’été est aussi dur, avec en plus la fermeture fin mars de 1 000 places d’hébergement d’urgence hivernale, et en juillet-août la fermeture de certains centres en raison de manque de personnel.

L’obscène déclaration de la secrétaire d’État à la Santé Nora Berra, conseillant aux personnes vulnérables – dont les sans-abri – de rester chez elles, marque le point culminant des mensonges de Sarkozy en 2007 (« zéro SDF d’ici deux ans »). Pour atteindre cet objectif, il aurait d’abord fallu ne pas traiter la question dans la rubrique « urgence grand froid », mais empêcher que des gens se retrouvent à la rue en interdisant les expulsions ; baisser les loyers au lieu de les faire augmenter ; construire des logements vraiment sociaux ; donner les moyens d’application à la loi Dalo.

Au lieu de ça, on a vu une réduction de 3,3 % du budget attribué cette année aux dispositifs d’hébergement et l’annonce le 20 juillet de la suppression de 4 500 « places d’hôtel » pour les remplacer par « des places de logements [...] d’ici la fin de l’année ».

Il faut en finir avec l’hébergement d’urgence, avec les appels au 115 (qui ne répond guère) qu’il faut renouveler tous les jours, et offrir des logements durables. Mais bien sûr, les logements promis ne sont pas arrivés, et on a laissé des centres d’hébergement vides tant que le thermomètre ne descendait pas en dessous de zéro.

Et il faut ajouter les arrêtés anti-mendicité, les matériels urbains pour empêcher la présence de SDF, la destruction des camps de Roms… la criminalisation de la pauvreté.

Il y a une lueur d’espoir avec la réponse du Conseil d’État le 10 février à une procédure de l’association DAL, qui implique qu’un sans-abri peut se plaindre de s’être vu refuser un hébergement et obtenir qu’une injonction soit faite aux autorités de lui trouver un toit.

Isabelle Guichard1. http://www.mortsdelarue.org

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