Égalités est le nom pris par l’organisation « Rejoignons-nous » en 2024. Au-delà des débats de « On construit l’alternative » dans lesquels se retrouvent Égalités, Ensemble, PEPS et le NPA, nous ouvrons nos colonnes à la discussion entre nos organisations sur les perspectives des partis que nous voulons construire.
Nous sommes confronté·es à des crises globales et interconnectées qui amplifient les catastrophes sociales et écologiques engendrées par le capitalisme et exigent des réponses politiques d’une ampleur inédite. La crise écologique, marquée par le réchauffement climatique, l’effondrement de la biodiversité, l’épuisement des ressources naturelles et d’autres seuils planétaires dépassés, menace directement les populations les plus vulnérables et les conditions mêmes de la vie sur Terre. Et une profonde crise sociale aggrave les inégalités, précarise les classes populaires, et s’intensifie avec le démantèlement systématique des services publics. À cela s’ajoute une crise démocratique, visible à travers une défiance croissante envers les institutions, une abstention record et la montée des extrêmes droites, qui exploitent les frustrations et les héritages colonialistes, racistes et impérialistes pour promouvoir des politiques autoritaires et réactionnaires.
Ces crises, interdépendantes, sont les symptômes d’un capitalisme écocide et autoritaire, incapable de répondre aux besoins fondamentaux du plus grand nombre. Elles convergent dans une menace néofasciste croissante à l’échelle mondiale. Face à ces défis, les réponses politiques actuelles, y compris celles de la gauche institutionnelle, manquent de radicalité, d’ancrage populaire et d’articulation avec les luttes sociales, écologiques et démocratiques.
Il devient urgent de construire une organisation politique révolutionnaire, unitaire et à vocation de masse, à partir des forces existantes — notamment du NPA-A —, qu’il faut élargir et diversifier. Cette organisation doit être anticapitaliste, écologiste, féministe, antiraciste, antifasciste, anti-impérialiste, antivalidiste, et autogestionnaire, en exprimant cette diversité dans un projet de révolution écologique, sociale et démocratique.
Il est temps de lancer un processus constituant dès la fin de l’année 2025, comme nous y appelions dans notre Manifeste de 2023 et dans celui de l’Alternative de 2025 auquel nous avons contribué.
Les limites des organisations existantes
La France insoumise (LFI) s’est affirmée ces dernières années comme un acteur central de la gauche radicale, mobilisant autour d’une rupture avec le néolibéralisme, structurant un espace politique à gauche et remportant des victoires électorales significatives. Cependant, ses limites sont évidentes : organisation verticaliste centrée sur une figure charismatique, exclusion des militant·es des décisions stratégiques, approche institutionnelle exclusive, internationalisme à géométrie variable, mépris des mouvements sociaux et focalisation sur les échéances électorales. Cela entrave sa capacité à s’ancrer durablement dans les luttes, la jeunesse et les quartiers populaires.
Le NPA-A, malgré une orientation politique pertinente, manque de forces suffisantes pour peser socialement et politiquement. Nous pensons qu’il ne pourra attirer une nouvelle génération de militant·es issus des mouvements sociaux que s’il s’engage pleinement dans la construction d’une nouvelle organisation collective avec elles et eux.
Les syndicats de classe sont plus populaires que les partis de gauche mais restent souvent confinés à des actions sectorielles. Ils peinent à articuler leurs luttes avec les enjeux écologiques, féministes et antiracistes, et à élaborer une stratégie de transformation radicale. De leur côté, les mouvements féministes, écologistes et antiracistes, malgré leur dynamisme et leur culture démocratique impliquant fortement la jeunesse, manquent de coordination stratégique
Dans ce paysage fragmenté, l’absence d’une organisation anticapitaliste fédératrice, construite à partir des luttes et capable de peser dans les alliances de gauche, antifascistes et au sein du Nouveau Front Populaire, crée un vide politique.
Les crises actuelles exigent des réponses globales et radicales, rompant avec les logiques du capitalisme. La bifurcation écologique, par exemple, ne peut se limiter à des réformes superficielles ou aux solutions technologiques du capitalisme vert. Elle doit s’inscrire dans une perspective de décroissance, associée à une justice sociale protégeant les classes populaires et redistribuant équitablement les richesses.
De même, la montée des extrêmes droites nécessite de dépasser une vision purement électorale de l’antifascisme. Une nouvelle organisation politique doit combiner la lutte contre les discriminations avec un combat global contre les inégalités sociales et écologiques, qui alimentent les discours réactionnaires.
Cette nouvelle organisation offrirait un espace politique aux populations souvent marginalisées dans les circuits militants traditionnels : jeunes, précaires, femmes, personnes racisées, habitant·es des quartiers populaires et des zones rurales, ainsi que personnes en situation de handicap.
Cette organisation devra développer des formes et des pratiques permettant d’articuler les luttes locales avec une stratégie nationale, tout en s’appuyant sur l’autogestion et la mobilisation populaire. Ainsi, elle construirait un projet profondément ancré dans les réalités sociales, en phase avec les aspirations populaires.
Des principes fondamentaux
Le projet de cette organisation repose sur des principes clairs. L’anticapitalisme, d’abord, implique une critique radicale des logiques de profit et de productivisme qui détruisent les écosystèmes et précarisent les travailleuses et les travailleurs. La démocratie directe et l’autogestion, ensuite, permettent de redonner du pouvoir aux citoyen·nes en construisant des structures horizontales, où le pouvoir est partagé et les responsabilités tournantes. Enfin, placer la lutte contre le patriarcat, le racisme et le validisme au cœur de ce projet, doit permettre une réelle prise en compte de ces questions et garantir que cette organisation sera réellement inclusive et représentative des populations les plus opprimées.
Cette organisation devra dépasser le cadre strictement électoral pour devenir un espace d’articulation des luttes syndicales, écologistes, féministes, antiracistes et antifascistes. En soutenant activement les mobilisations locales, elle garantirait une cohérence stratégique entre revendications de terrain et enjeux globaux.
Sa structuration locale devra selon nous jouer un rôle central. Des comités autonomes interconnectés créeraient un maillage territorial solide, ancré à la fois dans les quartiers populaires et les zones rurales. Ces espaces locaux offriraient aux militant·es un cadre d’action concret, tout en restant coordonnés à l’échelle nationale pour assurer la cohérence du projet.
L’objectif est une transformation radicale du système, bien au-delà de simples réformes superficielles. Cela inclurait une révolution écologique basée sur la décroissance, une riposte antifasciste structurée et un engagement internationaliste anticolonial. Ces ambitions doivent s’appuyer sur l’autogestion, la mobilisation populaire et la construction d’alternatives concrètes.
Les étapes de construction
La première étape (2023-2025), déjà entamée, consiste à cartographier les forces militantes existantes, en identifiant et associant les acteurs politiques, syndicaux, associatifs et les collectifs susceptibles de rejoindre le projet. La mise en discussion du Manifeste de l’Alternative, qui vient de paraître, devra permettre d’affiner collectivement les bases idéologiques et stratégiques du projet.
L’organisation de forums nationaux et d’assemblées locales doit permettre d’inclure un maximum de militant·es dans la réflexion. Comme l’écrit le Manifeste, nous proposons d’organiser sur cette base une « assemblée constituante formelle et représentative » fin 2025 pour lancer un processus constituant de cette nouvelle organisation politique
Une fois les bases posées, l’organisation pourrait se structurer autour de comités locaux autonomes, interconnectés par une coordination nationale. Des campagnes emblématiques sur des enjeux fédérateurs, comme la justice climatique, la lutte contre les mégaprojets écocides, pour des droits sociaux universels (les services publics, le logement), le droit à l’auto détermination ou la lutte contre les violences sexistes, renforceraient son ancrage dans les luttes et permettraient d’en élargir progressivement la composition.
Le bon moment : Pourquoi viser la fin de 2025 ?
Le lancement public de discussions et d’un processus constituant pour cette nouvelle organisation à la fin de 2025 permettrait de construire sans précipitation une base solide avant les élections de 2027 – moment de forte politisation et de risque d’accession au pouvoir de l’extrême droite. Ce calendrier répond à une fenêtre stratégique pour mobiliser des militant·es désillusionné·es par les partis existants, tout en profitant de la dynamique post- municipales pour relancer la gauche radicale. Au-delà de la gauche radicale, c’est tout notre camp social qui bénéficierait d’une telle dynamique.
Ce moment pourrait également coïncider avec une montée des mobilisations sociales en prévision des élections présidentielles et législatives.
En se positionnant comme une alternative complémentaire à LFI, cette organisation éviterait une dispersion des forces et jouerait un rôle fédérateur en articulant les luttes sociales, écologiques et démocratiques avec une stratégie politique cohérente.
Construire une organisation à la hauteur des défis du XXIe siècle
Les crises actuelles appellent une refondation politique radicale. Une nouvelle organisation, articulant sur un pied d’égalité l’anticapitalisme, l’écologie, le féminisme, l’antiracisme, l’anti-impérialisme et l’antivalidisme, est nécessaire. En lançant publiquement les discussions dès la fin de 2025, il sera possible de structurer une force crédible, capable de peser sur les enjeux politiques et sociaux à venir.
Ce projet ne pourra réussir que par une mobilisation collective, et nous avons besoin de l’initiative du NPA-A. Ensemble, construisons une alternative politique radicale, ancrée dans les luttes et les aspirations populaires, pour bâtir une société juste et émancipatrice.
* En 2024, Rejoignons-nous devient Égalités pour proposer une méthode pour construire collectivement et démocratiquement un nouvel outil politique, une sorte de maison commune avec une proposition de méthode : avancer pas à pas et, patiemment, à chaque étape, réfléchir ensemble à l’étape suivante.