Le G8 s’est réuni les 17 et 18 juin. Il comprend huit pays : États-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie, Canada et Russie. La Chine n’en fait pas partie. Trois dossiers essentiels ont été discutés durant ce G8 : la Syrie, la fiscalité et les relations commerciales internationales.La semaine précédant le G8, le gouvernement français avait donné son feu vert à l’ouverture des négociations pour un traité de libre-échange avec les États-Unis. Le seul bémol important mis par la France est la culture, ce qui a amené le président de la Commission européenne, Barroso, à qualifier la position française de « réactionnaire ». Il avait pourtant obtenu l’essentiel de ce qu’il voulait.
Faire sauter les obstacles au marchéEn effet, cet accord de libre-échange, s’il était conclu, serait un instrument supplémentaire de casse de ce qui reste des acquis sociaux et environnementaux européens au profit des intérêts des grands groupes industriels et financiers. Il ne s’agit pas seulement de droits de douane mais aussi, voire principalement, de normes et de règles régissant l’environnement, la qualité des produits alimentaires, le crédit, les assurances. Car ces règles sont considérées comme des obstacles aux échanges commerciaux et financiers. Ainsi, en matière agricole, les normes de qualité européennes sont d’un niveau le plus souvent supérieur à celles des États-Unis. L’accord pourrait ainsi faciliter l’entrée en Europe du bœuf aux hormones, des volailles lavées au chlore ou des OGM... Dans le même ordre d’idées, la loi française sur la fracturation hydraulique (gaz de schiste) pourrait être considérée comme une barrière à l’investissement et traînée en justice devant un tribunal commercial international (comme il en existe à l’Organisation mondiale du commerce). Le texte accentuera encore la liberté des mouvements de capitaux. Les banques et compagnies d’assurance américaines pourront opérer librement en Europe. Les mutuelles pourront ainsi être concurrencés par les compagnies américaines qui font payer leurs clients en fonction de leur état de santé. À l’issue du G8, les négociations vont démarrer avec la bénédiction de Hollande. Il faudra se mobiliser.
Contre les paradis fiscaux... faire semblant !L’autre grand sujet économique était la fiscalité. Il y a eu de grands roulements de tambour sur la fin des paradis fiscaux. Très bien mais, en 2009, le G20, c’est-à-dire le G8 + Chine, Inde, Brésil, etc., avait déjà proclamé sa volonté d’en finir avec les paradis fiscaux. Depuis, il n’y a pas eu grand-chose de concret. Pourquoi le sujet réapparaît-il aujourd’hui ? Une des raisons est le besoin de faire au moins semblant d’agir quand les peuples sont de plus en plus scandalisés par la destruction des services publics, et par l’augmentation des impôts et cotisations sociales pour la masse, alors que les « gros » y échappent.À l’issue du sommet, l’accord s’est fait sur une liste d’objectifs, notamment sur le renforcement des échanges automatiques d’informations entre les services fiscaux des différents pays et sur une plus grande transparence concernant les sociétés-écrans (qui permettent de dissimuler les bénéfices et les propriétaires réels). Mais le communiqué final ne contient aucun engagement ferme en vue de créer un registre des véritables propriétaires des entreprises, qui serait mis à la disposition de la justice et des services fiscaux. Car l’échange automatique des données ne sert pas à grand-chose si on se heurte à des structures opaques. Il faut connaître les propriétaires et bénéficiaires réels des sociétés et structures financières.François Hollande y est allé de sa déclaration triomphaliste : le G8 a accompli « un grand pas » dans la lutte contre la fraude fiscale, a-t-il déclaré. Le titre du quotidien financier les Échos est plus proche de la vérité : des engagements, mais « peu d’actions concrètes ».Car il ne faut pas oublier que le problème de l’évasion fiscale, c’est avant tout le comportement des banques et des capitalistes des pays riches. L’année dernière, le PDG de Google, Éric Schmidt, avait réagi avec fierté aux nombreuses attaques contre des pratiques de diminution des bénéfices. L’entreprise ne paye quasiment aucun impôt ? « Ça s’appelle le capitalisme », expliquait-t-il...
Henri Wilno