Publié le Samedi 13 juin 2020 à 08h05.

Municipales : Une gauche montpelliéraine en déconfiture... Sortir de l'impasse

Le spectacle donné par les deux forces de la gauche écolo-antilibérale, dans la perspective du second tour des municipales, est affligeant. Se divisant au premier tour dans un confusionnisme sidérant, une partie d'entre elles se réunifie, par l’entremise d’un clown misogyne et homophobe, autour du milliardaire local. Lequel grand patron, recalé sur l’investiture macronienne qu’il sollicitait, n’en a pas moins obtenu d’être appuyé par la députée vice-présidente du groupe LREM à l'Assemblée Nationale, une ancienne porte-parole du PS 34, une ex députée européenne des Radicaux de gauche ou encore Jean-Pierre Grand, vieux briscard du gaullisme, membre, dans sa jeunesse, de l’extrême droite, aujourd’hui sénateur PR.

C’est donc, emmenés par un self made man manageant d’une main de fer (dans un gant de crin) ses salarié.e.s, avec ces débris politiciens du « vieux monde » qui plonge, depuis des décennies, les couches populaires dans l’exploitation sauvage et l’oppression toujours plus violente que les têtes de liste et leurs proches de Nous Sommes et Confluence se proposent désormais de changer l’ordre des choses ! A mourir de rire si la farce n’était aussi avariée. Fort heureusement, cette magouille a été dénoncée par une bonne partie des colistiers. Mais cette réaction souffre d'un manque évident : on n'y voit aucun retour critique sur la démarche adoptée lors du 1er tour de ces élections municipales sur fond d'illusions électoralistes. Rappelons les faits. Ces 2 listes sont issues pour partie de La France Insoumise (“Nous Sommes” étant adoubé par la direction nationale, “Confluence” intégrant une partie d’EELV, avant qu’elle ne soit désavouée par Paris… pour excès d’affinités avec la gauche radicale). Les deux se fixant pour objectif de “battre Saurel”, sans fixer de limites aux éventuelles alliances permettant d'atteindre cet objectif et affirmant que leur fonctionnement "démocratique" suffisait à garantir leur indépendance. On retrouve là l'illusion que cette gauche reconduit d’année électorale en année électorale, à savoir que le changement passe « nécessairement » par le vote, par des institutions, les municipales comme les autres, pourtant structurées pour que tout change le temps d’une campagne pour que rien ne change, ou plutôt pour que tout s’aggrave, le reste du temps. Tout en étant sensibles au désarroi de tous ceux et de toutes celles qui se sentent floué.e.s et trahi.e.s par l'évolution de ces deux listes, nous ne pouvons que souligner que les choix électoralistes participent de la chronique de la mort annoncée d’une gauche qui, toute sociale qu’elle se revendique, ne veut pas rompre avec ses paris institutionnalistes. Pendant que le système qu’elle dit honnir fait, lui, un double pari : celui qu’il y en aura toujours à gauche pour mordre à l’hameçon du changement par le bien nommé « isoloir » et celui que les mouvements sociaux du type Gilets Jaunes, mobilisations pour les retraites ou « pour Adama » ne peuvent que s’en trouver, du coup, orphelins de débouché politique. Il faut avoir perdu toute boussole politique pour refuser de voir que ce n’est ni en faisant l’unité ubuesque avec un Altrad ni, comme certain.e.s déçu.e.s-trahi.e.s le suggèrent à mi-mot, avec la "gauche" que représenterait, malgré tout (Hollande, Valls, Frêche, Mandroux, etc.), un Delafosse, qu’on aidera des milliers d’acteurs sociaux déterminés à devenir eux/elles-mêmes les acteurs politiques de leur propre destin. Cette gauche, qui dit aspirer à un changement radical, malgré la répétition des trahisons, des déceptions, des impuissances qu’elle suscite, n’envisage pas un seul instant de dynamiter la funeste délégation de pouvoir par laquelle, paradoxalement en concurrence et connivence électorales avec les Altrad et les Delafosse (sans oublier les Saurel), elle vise à accéder…au pouvoir ! Le NPA 34 est prêt, comme il l’était à cette municipale, à participer à tout processus de recomposition politique qui permettra aux mouvements sociaux de se poser en centre de gravité politique pour une rupture radicale avec les logiques systémiques à l’œuvre tant à gauche qu’à droite. Ce qui s’est mis en place à Bordeaux autour de la liste emmenée par Philippe Poutou, par où des lutteurs et lutteuses reconnus, y compris de LFI, bousculent les jeux électoralistes, donne une idée de ce qui pouvait, pourrait, peut se faire à Montpellier comme ailleurs. Pour autant qu’on révolutionne quelques réflexes systémiques conditionnés…