La chute express du gouvernement Lecornu accentue l’illégitimité d’un pouvoir à bout de souffle. Face à la crise de régime, seule l’unité de notre camp social et la mobilisation populaire peuvent empêcher le RN d’en tirer profit.
On ne sait plus trop où donner du communiqué de presse. Désormais on tourne la tête et hop un gouvernement disparaît. À peine arrivé, voilà le gouvernement Lecornu déjà reparti, avant même la passation de pouvoir, la censure venant cette fois directement des ministres LR… Mais Macron demande quand même à Lecornu de continuer les négociations pour constituer un gouvernement. Cet entêtement pourrait relever du déni s’il n’illustrait pas, en fait, l’isolement d’un pouvoir sans solution, qui n’a plus de personnel pour incarner sa politique. Le gouvernement Lecornu comprenait ainsi 12 des 18 ministres du précédent.
Un pouvoir illégitime et moribond
Macron incarne un pouvoir illégitime, moribond, faible et détesté. Chaque jour qui passe, la crise de régime s’approfondit et s’accélère. La légitimité de ce pouvoir s’est effritée, lentement mais sûrement, depuis 2018 et les mobilisations des Gilets jaunes. Dans un contexte où la crise économique profonde du capitalisme empêche la bourgeoisie de faire des concessions en vue d’un compromis significatif avec le salariat. Dans ce processus, la bataille contre les retraites a provoqué une accélération et une usure inédite du pouvoir, dont Macron n’arrive toujours pas à se remettre. Nos mobilisations ont opéré comme des coups de boutoir contre le pouvoir, le fragilisant chaque fois davantage, sans pour autant parvenir à le faire tomber. Mais elles ont ouvert une période d’ingouvernabilité que nous devons saisir. Fait nouveau : le patronat commence à s’émouvoir de cette instabilité. Le CAC 40 a même perdu 2 % à l’annonce de la démission de Lecornu, avec des répercussions sur d’autres places financières européennes.
Seules nos mobilisations peuvent empêcher l’accession du RN au pouvoir
La manière dont Macron s’accroche et la difficulté à lui arracher une victoire de grande ampleur peuvent être démoralisantes. Mais il n’y a pas de raccourci : seules nos mobilisations font bouger les lignes. Elles seules peuvent dénouer la crise et empêcher l’accession du RN au pouvoir. ll faut donc renforcer celles qui vont succéder aux 10, 18 septembre et 2 octobre. Pourtant, au moment où le pouvoir est plus fébrile et faible que jamais, la mobilisation populaire semble marquer le pas ! Nous avons besoin d’un rebond pour ne pas laisser l’espace aux réponses institutionnelles et au RN. Partout où c’est possible, dans nos syndicats, nous devons essayer de pousser à ce que le mouvement social, dans l’unité, reprenne la main par des initiatives de rue, sans attendre novembre.
Marcher ensemble autour de revendications unifiantes
Le manque d’unité sur le plan social et politique, comme le fut le NFP l’année dernière, pèse dans la confiance de notre camp social dans la possibilité d’une victoire et d’un gouvernement rompant avec la politique de l’offre. Les organisations qui ont participé au NFP ont une responsabilité : organisations politiques, forces syndicales, associations, « Bloquons tout », nous devons marcher ensemble autour de revendications unifiantes que seul un gouvernement populaire de rupture, appuyé sur la mobilisation, pourra mettre en place. Ces revendications existent déjà, qu’elles prennent la forme du programme du NFP ou des revendications que l’intersyndicale avait portées pour le 18 septembre. Et elles sont clairement majoritaires dans le pays : retraites à 60 ans, augmentation des salaires et des minimas sociaux, plafonnement des loyers, interdiction des licenciements, justice fiscale, sociale et écologique, liberté de circulation et d’installation pour les étrangerEs, refus du militarisme et arrêt de la complicité avec le génocide en Palestine…
Mais sans mobilisation de masse, même un tel gouvernement ne pourrait mettre en place des mesures pour répondre aux besoins sociaux. Dénouer la crise exige de reprendre la rue, par les manifestations et la grève, créer le rapport de forces avec la bourgeoisie pour en finir avec la 5e République et imposer un programme d’urgences sociales, écologiques et démocratiques.
William Donaura