«Il y a eu un ratage manifestement psychiatrique ». C’est en ces termes que Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, a commenté le meurtre d’un touriste allemand par Armand R. M. près de la tour Eiffel le 2 décembre. Ce dernier, déjà condamné pour avoir projeté un attentat en 2016, a posté une vidéo justifiant son acte par « l’actualité, le gouvernement, le meurtre de musulmans innocents ». Suivi depuis sa sortie de prison par les services de renseignement, il l’était aussi sur le plan psychiatrique.
Les propos dignes d’une cour de récréation de Darmanin — « C’est pas moi, c’est l’autre » — n’ont d’autre but que de reporter sur les erreurs d’appréciation de la psychiatrie un drame pour lequel lui et ses services n’auraient aucune responsabilité.
Dans le droit fil de son modèle Nicolas Sarkozy, Darmanin voudrait encore un peu plus que la psychiatrie soit, non un outil de soin au service de personnes en souffrance, mais une annexe du ministère de l’Intérieur ayant pour vocation première et illusoire de « protéger » la société contre la « dangerosité » de la folie.
Marine Le Pen et Jordan Bardella poussent cette logique jusqu’au bout en exigeant l’extension de la « rétention de sureté », c’est-à-dire la possibilité de maintenir enfermée toute personne, sans qu’elle ait commis un acte ou une fois sa peine purgée.
La psychiatrie aujourd’hui sinistrée, avec des budgets en baisse (contrairement à ceux du ministère de l’Intérieur) ne parvient plus à remplir les missions qui sont les siennes. Faute de moyens, l’enfermement, la contention, le renforcement des traitement médicamenteux remplacent ce qui avait fait ses avancées au cours des dernières décennies : un accueil bienveillant, un soin apporté par la parole et la relation soignante.
C’est en permettant aux personnes que la psychiatrie soigne d’aller mieux qu’elle peut éviter certains passages à l’acte, sans que cela puisse être garanti. Ce n’est pas en se mettant encore un peu plus au service des politiques sécuritaires !