Publié le Jeudi 6 octobre 2011 à 17h06.

Budget 2012 : rigueur, acte I

Le gouvernement vient de présenter le nouveau projet de loi de finances. Le programme est clair : rigueur pour les pauvres, cadeaux fiscaux pour les riches.Mercredi 28 septembre, le nouveau projet de loi de finances (PLF) a été présenté en Conseil des ministres. Il affiche l’objectif de ramener le déficit public à 4,5 % du PIB en 2012 (contre 5,7 % actuellement). Comment ? Pour la ministre du Budget, Valérie Pécresse, la priorité doit porter sur les dépenses publiques. Le PLF programme la suppression de 30 400 postes de fonctionnaires l’an prochain. Près de la moitié concerne l’Éducation nationale. Soulignant les limites de la politique de son propre camp, le député UMP et rapporteur de la Commission des finances, Gilles Carrez, redoute de « grandes difficultés pour la rentrée scolaire 2012 ». Mais l’ampleur de la grève du 27 septembre a montré que la situation est d’ores et déjà insupportable dans de très nombreux établissements.

En supprimant à nouveau des postes, le gouvernement va non seulement détériorer un peu plus le service public et les conditions de travail des salariés du secteur public, mais il va aussi aggraver le chômage des jeunes. Par ailleurs, les dépenses consacrées à la lutte contre le chômage subissent une chute de plus de 10 %. Il s’agit de la fin de mesures très contestables, mais que rien ne vient remplacer ! Or, depuis le mois de mai, le chômage s’envole. Officiellement, le nombre de demandeurs d’emploi de catégories A, B et C s’établit à 4,41 millions (+4,3 % sur un an). La hausse est particulièrement spectaculaire chez les plus de 50 ans (+14,6 % sur un an). C’est un effet de la réforme des retraites : avant celle-ci de nombreux travailleurs âgés ne trouvaient pas d’emploi mais pouvaient partir en retraite à 60 ans. Ils doivent désormais attendre davantage. Une fiscalité injuste et inefficace

Ce PLF modifie aussi la fiscalité, en concrétisant les mesures annoncées en août par François Fillon. Le gouvernement augmente les taxes sur les complémentaires santé au moment même où une étude de UFC-Que Choisir révèle que la fiscalité de ces contrats a été multipliée par sept depuis 2005. Avec les franchises, les déremboursements de médicaments, le forfaits hospitalier et les augmentations d’honoraires, les dépenses restant à la charge du malade ont augmenté deux fois plus vite que ses revenus. L’association a aussi calculé que si le désengagement de ­l’assurance maladie continuait au même rythme que depuis 2004, les tarifs des complémentaires santé monteraient jusqu’à une moyenne de 200 euros par mois en 2020.

L’effort est partagé nous dit-on ? Le sénateur centriste Jean Arthuis, qui avait d’abord jugé qu’un prélèvement sur les hauts revenus serait « juste et équitable », a qualifié celui-ci de « symbolique et dérisoire » lorsque les détails en ont été révélés. La taxation temporaire des hauts revenus consistera à prélever 3 % sur les revenus dépassant 500 000 euros par an (soit 39 Smic). Cela ne rapportera que 200 millions d’euros... alors que le gouvernement vient de réduire l’impôt sur la fortune (ISF) de 1,86 milliard ! « L’effet d’allègement de cet impôt sera notable, surtout sur les grosses fortunes » se réjouit la Tribune dans son cahier « spécial ISF » (23/09/2011).

Mais il y a plus grave. Ce PLF 2012 n’est qu’une étape. D’abord parce qu’un milliard d’euros d’économies n’ont pas encore été détaillés. Ensuite, parce qu’il tente de ménager les apparences avant les élections à l’aide de prévisions de croissance irréalistes. Au printemps, le gouvernement – qui prévoyait encore 2 % de hausse du PIB en 2011 et 2,25 % en 2012 – comptait sur « l’intensification de la reprise » pour accroître les recettes fiscales. Il sous-estimait alors l’impact des mesures de rigueur sur la consommation (voir Tout est à nous ! n° 101). Mais voici que le gouvernement récidive : sa prévision actuelle (1,75 % en 2011 et 2012) est hors d’atteinte, il devra donc trouver encore 3 ou 4 milliards d’euros pour boucler le budget 2012. Davantage si la crise poursuit son accélération. Il nous faut donc convaincre le plus largement possible de la nécessité de préparer dès maintenant la résistance au prochain plan de rigueur et l’opposition au futur pouvoir en place. Quelle que soit la couleur de celui-ci.

Philippe Légé