Publié le Lundi 8 mars 2021 à 18h21.

Grève à la SNCF dans le Nord-Pas-de-Calais : un mouvement qui prend son élan

Une fausse apparence de calme régnait dans la gare de Lille Flandres en ce lundi matin de reprise des classes. La circulation du nœud ferroviaire du Nord – Pas-de-Calais était très réduite. Et pour cause : 72% des agentEs de contrôle (soit près de 150 grévistes sur environ 200 devant travailler) étaient officiellement en grève. 

La direction a eu beau s'arracher les cheveux pour faire rouler des trains, rien n'y a fait : quand les cheminotEs font grève, la production s'arrête !

Qui sème le vent récolte la tempête

Au bout de la voie zéro, une assemblée générale rassemble une vingtaine de grévistes. ChacunE y met sur la table tous les sujets de mécontentement : la réorganisation du service en 2021 prévoit des périodes d’activité à rallonge avec des journées à coupures interminables et des « découchés » mal assurés, la pression est mise sur les opérations de contrôle sous forme de quotas (il faudrait que les contrôleurEs fassent du « chiffre » !), les congés ne sont pas accordés ou le sont trop tard, les primes prévues non distribuées, les temps de trajets nécessaires au service de dizaines de minutes chaque jour sont systématiquement exclus du temps de travail… L’entreprise cherche à faire des économies par tous les moyens et celui qu'elle préfère reste les suppressions d’emplois.

Au contraire, il faut des embauches supplémentaires : un gréviste à l’AG insiste sur celles des intérimaires. Les cheminotEs présents sont déterminés. Nombre d’entre elles et eux prennent la parole, la reprennent pour compléter ; on veut être exhaustifs et suggérer des suites. Les unEs décrivent la dégradation de ces vingt dernières années, les autres évoquent l’insécurité du métier : les insultes subies deviennent trop banales, l’isolement renforce la peur, le mépris des chefs décourage de la surmonter, l’absence de reconnaissance des agents pèse… jusqu’à ce que ça craque et déborde. Au front pendant toute la crise sanitaire, ce n'est pas à ces cheminotEs que la prime Covid est revenue mais aux chefs dans les bureaux.

Avant cette journée quelques coups de colère ont déjà eu lieu comme à Valenciennes où les contrôleurEs ont fait grève à 100% deux semaines auparavant, ou au technicentre d’Hellemmes qui a connu un débrayage important... C’est dans la suite de ces succès que cette journée s’inscrit. Venus d’autres services comme l'aiguillage ou le service social, quelques cheminotEs évoquent les réductions d’effectifs avec partout le même constat des attaques, certes pas nouvelles mais accélérées en cette période.

L'envie de touTEs : que ce ne soit qu'un début !

D’autres rassemblements à Douai ou à Béthune ont également lieu. Les cheminotEs savent que cet avertissement doit appeler des suites. Un peu paniquée, la direction a appuyé sur le bouton « dialogue social » en convoquant d'elle-même une réunion d’urgence avec les syndicats. Elle tend déjà des pièges en voulant diviser les grévistes par résidences, faisant miroiter de meilleures tournées aux uns au détriment des autres. Et en termes d'embauches, elle ne parle que de renforts intérimaires ou d'offrir des primes alléchantes aux agents d'Eurostar (actuellement en chômage partiel) pour combler les trous dans la raquette. Mais les travailleurEs qui se rappellent 2018 et 2019 ne sont pas dupes. Il faudra de nouvelles journées, se retrouver plus nombreux encore, plus puissants. Alors on s’active : comment nouer des liens avec les contrôleurEs des autres résidences ? Comment s’adresser aux conducteurEs ? Il convient dès maintenant de densifier les liens et produire un récapitulatif précis de ce qui n’est plus acceptable. Dans cette plateforme de revendications qui est rédigée sur une feuille par touTEs les présentEs dès la fin de l'AG, chacunE tient à mentionner ce qu’il veut voir figurer. Une boucle de contacts va permettre de se donner les informations importantes et de s'organiser pour la diffuser. On prévoit de se diriger vers les collègues des autres services, pour entraîner de nouvelles têtes dans la lutte, confirmer sa force et qu’il se passe bien quelque chose.

Les usagerEs patientent calmement, sans hostilité. Dans le reportage diffusé le matin même sur BFM, aucun ne vilipendait les grévistes : tous les interviewés marquaient plus ou moins leur soutien. On se rappelle peut-être l'hiver dernier et ses trains bondés, les lignes supprimées... Et de l’avis d’usagerEs eux-mêmes, les suppressions d’emplois ne sont pas qu’un problème de cheminotEs.